Le 26 novembre 2019 | Mis à jour le 29 octobre 2020

Street art : un marché adolescent

par Clémentine Pomeau-Peyre

C’était il y a un an : après une bataille d’enchères qui l’avait menée jusqu’à 1,2 million d’euros, une œuvre du célèbre Banksy s’auto-détruisait en direct. Catastrophe ? Pas du tout, selon les experts, cet événement peut même avoir donné une valeur supplémentaire à la toile…

 

Shepard Fairey (Obey), Stay Up Girl, 2019. Sérigraphie sur papier d’un format de 91 x 61 cm. L’œuvre est signée et datée au crayon par l’Artiste en bas à droite. Etude Sadde.

Le succès de cet artiste « entraîne derrière un flot de jeunes artistes, c’est un peu la locomotive du marché » estime Guilhem Sadde, « tout comme Shepard Fairy dit Obey, ou Miss.Tic ». Son étude dijonnaise proposait une vente le 13 novembre dernier, consacrée au Pop & Street art, « avec notamment un vinyle d’après Banksy, une pièce d’édition.

Les ventes de Street Art intéressent un public assez pointu, plus jeune que la moyenne de ceux qui fréquentent habituellement les salles de ventes, et il faut parfois trouver de nouvelles manières d’aller le chercher. L’étude Richard, à Villefranche-sur-Saône, construit ainsi année après année cette nouvelle spécialité : « nous avons un partenariat avec les puces du Canal, ce qui nous permet d’avoir, depuis avril dernier, un corner permanent exposant de jeunes artistes, en leur présence au début de l’exposition, et nous retrouvons ensuite leurs œuvres dans nos ventes. » Le système est gagnant pour les trois parties, car « tout le monde sort de sa zone de confort, je sors de ma salle de ventes, les artistes apprennent à se présenter devant les clients, et les puces font la promotion de jeunes émergent » souligne Maître Richard. Parmi ses clients, beaucoup de jeunes aux expositions, « mais les acheteurs restent principalement des quinquagénaires, des collectionneurs », et un certain nombre d’entreprises qui profitent de la défiscalisation possible lorsqu’il s’agit d’œuvres d’artistes vivants. « Certaines poursuivent ensuite avec les artistes et leur commandent directement des œuvres, des fresques ».

 

M. Chat (Thoma Vuille), Chats volants à Paris Circa 2017. Sérigraphie sur papier vélin d’un format de 70 x 50 cm. Numérotée et signée dans la planche. Etude Sadde.

 

L’étude Sadde relève de son côté que cette nouvelle clientèle est encore à éduquer, à conquérir, surtout en ce qui concerne les artistes moins connus. Les ventes marchent très bien pour les noms connus, et les multiples : pour exemple, la vente du 13 novembre proposait notamment des sérigraphies de Shepard Fairey (Obey) adjugées de 105 à 460 euros, des gravures de Speedy Graphito (entre 120 et 1000 euros), de Blek le Rat (800 à 1 000 euros) ou une sérigaphie de Monsieur Chat adjugée à 270 euros. Les œuvres originales ont logiquement des cotes plus élevées : un dessin de JR à l’encre noire était estimé 1300-1500 euros, et une toile de Seen représentant Popeye (spray sur toile), 8 000 à 10 000 euros.

 

Seen, 2019, Popeye. Spray sur toile. Format : 104,1 x 104,1 cm. Etude Sadde.

 

Graffiti au pochoir sur un bloc de granite représentant David Bowie présenté à l’occasion du collectif de graffeurs organisée par Banksy à 10 Malan André au Royaume Uni en 2015. Etude Darmancier et Clair.

Autres supports, l’étude Darmancier et Clair à Bourges ouvrait sa vente de street art du 16 novembre dernier avec une série de graffitis au pochoir sur blocs de granits et fragments de ciment. Des pièces d’une taille (et donc d’un poids) raisonnables, estimées entre 80 et 180 euros environ.

Car s’intéresser au street art est aussi l’occasion de se confronter à d’autres supports : des morceaux de murs, des bombes aérosols, des planches de skate revisités, des billets de banque customisés, des compressions, des dessins au bic… Pas toujours évident pour les amateurs de s’y retrouver ! Les artistes, qui ont pour la majorité débuté leur carrière dans les rues, s’adaptent sous l’influence des galeries et du marché de l’art pour élaborer des œuvres transportables et exposables. « Ils déclinent leur patte, leur identité sur des lithographies, des gravures, mais il faut qu’elle soit très forte, reconnaissable en coup d’œil », explique Guilhem Sadde. Son étude a récemment proposé sans succès une pièce de maçonnerie avec un pochoir de Miss.Tic, son encombrement et son poids de 100 kg ont probablement découragé les amateurs…

 

Véro Cristalli (né en 1965), « Advengers », bombe aérosol avec collage et acrylique, signée sous la base. H : 19 cm. Etude Darmancier et Clair.

 

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