
5 choses à savoir sur Léonard Foujita
Membre éminent de l’Ecole de Paris, Léonard Tsuguharu Foujita a marqué le XXe siècle avec ses œuvres mêlant à l’héritage occidental, les techniques traditionnelles japonaises telles que l’emblématique Nyuhakushoku, blancheur de lait, qui a fait sa renommée. Retour sur cet artiste franco-japonais que les critiques des Années Folles se plaisaient à qualifier de magicien.
1. Son art fait le pont entre l’Orient et l’Occident
Peu après son arrivée à Paris en 1913, Léonard Tsuguharu Foujita 藤田 嗣治 (1986-1968) rencontre Zadkine, Modigliani, Picasso ou encore Soutine, des artistes du quartier de Montparnasse et membres de l’Ecole de Paris, qu’il intègre à son tour. Il est fortement marqué par leurs travaux et tout particulièrement par le cubisme de Picasso qui le conduit à remettre en question sa formation à l’Ecole des Beaux-Arts de Tokyo. Il développe à leur contact un style personnel, à la croisée de l’Orient et de l’Occident. Si ses sujets tels que les nus féminins, absents de l’art traditionnel japonais, sont hérités de la peinture occidentale, l’artiste conserve toujours un style japonisant, usant d’un dessin minimaliste pour dépeindre ses figures féminines au teint opalin. Il retient également de sa formation la méthode japonaise du tsukuri-e [Ndlr. technique de la peinture japonaise qui en définit les étapes de création, du dessin préalable à l’ordre d’application des couleurs] qui confère à ses œuvres une ligne assurée. A cette technique, il combine systématiquement des références à la tradition occidentale, s’inspirant tant de Michel-Ange que de Rodin dont il reprend les compositions et gestuelles des corps.

Léonard Tsuguharu Foujita, Trois jeunes filles servant le thé, gouache et aquarelle sur fond doré sur papier. Estimation : 70 000 – 100 000 euros.
2. Il multipliait les médiums, de la peinture à la céramique
Outre la peinture, l’artiste voue un intérêt tout particulier à la photographie qu’il pratique assidûment lorsqu’il acquiert un exemplaire du célèbre Leica II en 1929. Son œil de photographe décrypte le genre humain sous un angle documentaire qu’il développe au cours de ses nombreux voyages, notamment en Amérique du Sud. Au gré de ses rencontres, Foujita s’essaie également à la céramique, à partir des années 1930 à Châtillon, puis dans les années 1950 aux côtés de Picasso dans l’atelier Madoura à Vallauris. Sa production, résolument moderne, est, là encore, imprégnée de l’esthétique du Soleil levant, ses motifs animaliers minimalistes évoquant les estampes japonaises. Ponctuellement, Foujita s’essaye également à la création de costumes et décors pour l’opéra italien Madame Butterfly de Giacomo Puccini.

Léonard Tsuguharu FOUJITA (1886-1968) et Raoul LACHENAL (1885-1956), Poisson et crustacés. Pièce unique, épreuve en céramique émaillée au décor polychrome sur fond blanc finement craquelé. Adjugé 2 287 euros par Maîtres Camper et Dabernat, le 31 janvier 2015.
3. Il a illustré de nombreux livres
Dans une démarche toujours multidisciplinaire, Foujita réalise de nombreuses illustrations de livres, exercice qu’il compare volontiers à « la réalisation d’un vêtement pour femme : respectueux du corps, le texte, et valorisant la silhouette, l’objet livre. » Ainsi illustre-t-il La troisième jeunesse de Madame Prune ou Madame Chrysanthème de Pierre Loti, Les Animaux malades de la peste de Jean de la Fontaine ou encore Les Vergers des Amours de Guillaume Apollinaire.

Pierre Loti, La troisième jeunesse de Madame Prune, Paris, les éditions d’art Devambez, 1926. Illustré de dix-sept compositions originales gravées en couleurs par Foujita. Estimation : 800 – 1 500 euros.
4. Il a conçu une chapelle d’art total
Converti au catholicisme en 1959, Foujita décide, avec le concours de son parrain de baptême, l’homme d’affaires René Lalou, de faire construire à Reims, une chapelle consacrée à Notre-Dame-de-la-Paix dont il serait le concepteur, l’architecte et le décorateur. La volonté de l’artiste d’agir sur tous les aspects esthétiques de la construction fait de cette bâtisse une œuvre d’art total, qui donne à voir aux visiteurs l’ampleur du génie de son créateur. Les décors, entièrement réalisés par l’artiste dans le respect des traditions occidentales, sont apposés dans un a fresco moderne à base de ciment frais qui n’admet aucun repentir et dont le temps de séchage impose de terminer chaque dessin commencé plus tôt dans la journée. Le choix de cette technique suppose la réalisation préalable de nombreuses esquisses et dessins dans la continuité de la tradition tsukuri-e.

Léonard Tsuguharu Foujita, Notre-Dame-des-Vendanges, Reims, Musée des Beaux-Arts (inv.CHAPELLE FOUJITA_F11) Photo : © Christian Devleeschauwer
5. Il connaît un grand succès sur le marché de l’art
Foujita, volontiers dandy, aimait se mettre en scène, se déguiser, et participait activement à la vie mondaine parisienne. Il connaît le succès de son vivant et ce, dès sa première exposition chez Georges Chéron, ainsi que dans les Salons de peinture à Paris, Bruxelles et aux Etats-Unis. En 1925, il est nommé chevalier de la Légion d’honneur et il fait don de certaines de ses œuvres qui entrent dans les collections de musées prestigieux, dont le Musée d’Art Moderne de la ville de Paris qui conserve son Nu à la toile de Jouy ou encore le musée des Beaux-Arts de Lyon qui conserve son Autoportrait au chat. Cette reconnaissance, populaire autant qu’institutionnelle, ne s’est pas tarie depuis. L’artiste fait l’objet de nombreuses expositions depuis les années 2010, autant au Japon qu’en Europe et plus particulièrement en France où son catalogue raisonné est édité. Ce succès ne s’essouffle pas sur le second marché et ses dessins, peintures et illustrations ne cessent de susciter l’intérêt des collectionneurs du monde entier. La cote de l’artiste semble avoir pris un nouvel élan en 2016, lorsque celui-ci devient l’un des cent artistes les plus vendus au monde. Sans oublier son record de vente aux enchères pour La fête d’anniversaire adjugée 8 095 615 euros (frais inclus) par la maison Bonhams en 2018. Cette toile, figurant un anniversaire fêté par diverses espèces animales, donnait à voir, en une mise en abyme, un nu allongé à la carnation Nyuhakushoku (blancheur de lait), la marque de fabrique de l’artiste.
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Léonard Tsuguharu Foujita, Coffret de peinture à tiroir en bois peint. L’intérieur composé de sept tiroirs peints, le premier signé de la main de l’artiste, ces derniers remplis d’objets souvenirs. Estimation : 20 000 – 40 000 euros.