
Comment apprécier et décrypter la faïence de Nevers
La faïence, c’est tendance ! La manufacture de Nevers, l’une des plus anciennes et des plus prolixes centres de production de poteries en France, sera mise à l’honneur samedi 3 février 2018 à l’Hôtel des ventes de Royan et sur le Live, à l’occasion de la dispersion d’une collection de près de 80 saladiers, assiettes, bénitiers et Vierges à l’Enfant des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles. Si certains modèles de Nevers peuvent atteindre plusieurs milliers d’euros aux enchères (11 200 euros adjugé pour une assiette du XVIIIe siècle en juin 2017 à Toulouse), les acheteurs peuvent également se faire plaisir avec des lots de belle facture à des prix attractifs.
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L’emblème d’une région
Le marché des faïences de Nevers est particulièrement actif dans la région nivernaise. « L’attachement pour cette manufacture locale est renforcé par l’utilisation récurrente d’emblèmes forts de la Nièvre à l’image du pont de Nevers, très souvent représenté, comme sur ce modèle de 1809 estimé de 5 000 à 6 000 euros », explique Maître Jean-Renaud Geoffroy, commissaire-priseur de la vente. Mais preuve de l’intérêt outre-nivernais que cet art du feu suscite : le collectionneur qui a amassé ces 76 faïences de Nevers (assiettes, saladiers, bénitiers, vierges à l’Enfant…) était de Royan. Il s’agit d’un célèbre ostréiculteur du nom de James Ancelin.
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La virtuosité du grand feu
L’une des caractéristiques de la faïence de Nevers est sa cuisson de « grand feu ». « Les couleurs sont posées sur l’émail encore cru, l’artiste fait donc preuve d’une virtuosité certaine pour peindre sur ce support encore volatile et malléable. Certaines manufactures, dans l’Est de la France par exemple, ont elles opté pour une technique différente dite de « petit feu », avec une cuisson supplémentaire qui permet de travailler avec plus de précision sur une surface lisse et solide. Les couleurs de grand feu sont quant à elles appréciées pour leur côté plus brut », s’enthousiasme Maître Geoffroy. Pour différencier les deux cuissons, il suffit de vérifier la présence de rouge, une couleur qui ne supporte pas la température employée en grand feu et qui s’avère donc uniquement présente en petit feu.
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Une faïence populaire à l’esthétique naïve
Comment déloger les hommes perchés dans l’arbre ? Pour faire tomber ces messieurs, un groupe de femmes s’affaire à couper le tronc et les branches à l’aide d’une scie, d’une canne et même d’une hache. Impassible, l’Amour personnifié trône à la cime en observant la scène, qui raille la stricte répartition des tâches respectée au XVIIIe siècle. « Le thème de l’arbre d’amour est un grand classique de la faïence de Nevers. Ce grand modèle, de format saladier, daté de 1780 est estimé de 4 000 à 5 000 euros », détaille le commissaire-priseur. Le côté naïf de cette scène, et plus généralement de l’esthétique des décors de cette faïence populaire continue aujourd’hui de plaire aux acheteurs.
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Madeleine, Robert et Etienne : le top des prénoms tendance
Pour célébrer un mariage, une naissance ou tout autre événement, la manufacture de Nevers réalisait, à la demande, des assiettes patronymiques, marquées du nom de la personne fêtée et illustrées de son saint patron. « Les collectionneurs sont aujourd’hui à la recherche des prénoms les plus rares célébrés sur les assiettes. Ainsi, dans la vente, Madeleine, Robert et Etienne figurent parmi les plus inhabituels et présentent des estimations entre 400 et 600 euros », note Michel Vandermeersch, expert en céramique. Les détails révolutionnaires sont également particulièrement recherchés, comme un bonnet phrygien, un drapeau français ou même la mention d’une date comprise entre 1789 et 1799.
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