
De Rosa Bonheur à Charles Lacoste, la peinture bordelaise sous le feu des enchères
A l’occasion de la 7e édition de sa vente de peintures bordelaises, le commissaire-priseur Antoine Briscadieu présentera aux enchères près de trois cents œuvres datant du XVIIIe siècle à nos jours, dont un ensemble provenant de la collection de Gabriel Frizeau, un amateur d’art visionnaire. Au programme, une peinture animalière de Rosa Bonheur côtoiera des gravures d’Odilon Redon et des tableaux inédits de Charles Lacoste, un artiste bordelais méconnu qui s’illustra à travers des paysages symbolistes.
Chaque année, la maison Briscadieu convie les amoureux de la peinture régionale à célébrer, le temps d’une exposition et d’une vente, les artistes bordelais. Pour la 7e édition, le commissaire-priseur a réuni un ensemble d’œuvres du XVIIIe siècle à nos jours. « La sélection a été rude, confie Antoine Briscadieu. Il nous a fallu faire des choix afin de donner à cette vente un caractère exceptionnel et inédit. Le succès des éditions précédentes a en effet permis de faire ressortir des œuvres conservées jusqu’alors dans l’anonymat et l’enjeu cette année était d’éviter de tomber dans la répétition tout en gardant un certain niveau d’exigence. »

Rosa Bonheur (1822-1899), Vache blanche couchée. Huile sur papier marouflé sur toile. 33 x 41,5 cm. Estimée entre 3 000 et 5 000 euros.
La collection de Gabriel Frizeau, un amateur d’art visionnaire
Si une huile sur papier de Rosa Bonheur arrive à point nommé avec la rétrospective du musée d’Orsay, des œuvres d’artistes bordelais méconnus sont ainsi mis en lumière à la faveur de cette vente, à l’instar de Charles Lacoste (1870-1959) dont trois tableaux inédits devraient constituer, avec quatre gravures d’Odilon Redon, le point d’orgue de cette vacation. Ces œuvres affichent en effet une provenance des plus prestigieuses puisqu’elles appartenaient à Gabriel Frizeau, un viticulteur bordelais qui, grand amateur d’art, se distingua par ses acquisitions visionnaires. « Il est le premier propriétaire d’œuvres majeures de l’Histoire de l’art, comme le testament pictural de Gauguin, D’où venons-nous ? Que sommes-nous ? Où allons-nous ? », conservé aujourd’hui au musée de Boston », précise Antoine Briscadieu. Son appartement, situé au 17 de la rue Régis à Bordeaux, accueillit maintes personnalités, d’André Gide à Paul Claudel.
Des tableaux inédits de Charles Lacoste
Pour le poète Francis Jammes, « Charles Lacoste habite le pays de la discrète harmonie » – discrète, son œuvre demeure de fait confidentielle et connue aujourd’hui des seuls initiés. Si le musée d’Orsay conserve en ses murs La Main d’ombre (à l’ombre d’ailleurs de ses réserves), le peintre ne jouit pas de la célébrité d’artistes qui composaient son entourage tels Odilon Redon ou Maurice Denis. Avec eux, il partageait pourtant un même goût pour l’épure et l’onirisme, et a livré des vues poétiques, volontiers symbolistes et héritières de l’art japonais, des paysages de sa région, dépeignant la Garonne vêtue de son manteau hivernal ou la Gironde fuyant vers l’océan un soir d’été. « […] je cherche ce qui est caché, le sentiment des choses, des ciels » confie-t-il à son ami poète dans une lettre de 1904.

Charles Lacoste (1870-1959), Paulovnias en fleurs, 1907. Huile sur carton. 50 x 65 cm. Estimée entre 1 500 et 2 000 euros.
Né à Floirac, Charles Lacoste fait ses premières gammes à Bordeaux, avant de rejoindre la capitale en 1889, où il expose au Salon des artistes indépendants, participe à la fondation du Salon d’automne et se lie d’amitié avec André Gide. Le brouillard londonien, où il séjourne à plusieurs reprises, lui inspirera des paysages mélancoliques et brumeux. Autant de formes évanescentes qui, mêlées à une palette subtile et lumineuse, composeront ses vues de Pardies, une petite commune des Pyrénées-Atlantiques où trône désormais, non loin du cimetière où il repose, son portrait exécuté en bronze par le sculpteur Nicolas Kennett.
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Charles Lacoste (1870-1959), Fumée, 1903. Huile sur carton. 68 x 92 cm. Estimée entre 10 000 et 15 000 euros.