Des doubles numériques au service des commissaires de justice, entretien avec le fondateur d’Unikbase
La Chambre régionale des commissaires de justice de la Cour d’appel de Paris vient de nouer un partenariat avec Unikbase, une société spécialisée dans la création des doubles numériques. Entretien avec le cofondateur de cette startup française, Etienne Hermite…
Après une levée de fonds de 2 millions d’euros, la startup française Unikbase annonce un partenariat avec la Chambre régionale des commissaires de justice de la Cour d’appel de Paris qui regroupe, depuis le 1er juillet 2022, les commissaires-priseurs judiciaires et les huissiers de justice de Paris. Le cofondateur d’Unikbase, Etienne Hermite, revient sur l’utilité de ces « doubles numériques » qui seront prochainement mis à la disposition des opérateurs de vente.
Vous avez fondé l’an dernier la société « Unikbase », spécialisée dans la création de « doubles numériques ». Comment ce projet a-t-il émergé ?
J’ai fait une grande partie de mon parcours professionnel dans diverses start-up liées à la technologie et je cherchais l’an dernier un projet autour des technologies de blockchain qui maintienne un lien avec le monde physique. Au fil de rencontres, j’ai été amené à développer ce projet qui consiste à créer, pour des objets physiques dotés d’une valeur importante, un certificat numérique que j’ai appelé « double numérique ». Ce pendant numérique constitue la carte d’identité de l’objet, et un support très utile notamment pour les assurances. Il combine deux technologies : une technologie de marquage qui permet d’identifier de façon certaine un objet physique, ainsi qu’une technologie de blockchain.
Vous venez de nouer un partenariat avec la Chambre régionale des commissaires de justice de la Cour d’appel de Paris qui regroupe, depuis le 1er juillet 2022, les commissaires-priseurs judiciaires et les huissiers de justice de Paris. En quoi consiste ce partenariat ?
La Chambre régionale avait commencé à développer un service de dépôt de documents sur une blockchain et elle recherchait une technologie permettant de travailler sur des objets physiques. Cet intérêt s’inscrit dans le prolongement naturel des ventes en ligne qui attirent de nouvelles personnes désireuses d’obtenir davantage de garanties. Cet après-midi se tiendra une première vente de démonstration au sein de l’étude parisienne Pestel-Debord où nous allons distribuer aux acquéreurs le double numérique des objets dont ils auront fait l’acquisition. L’objectif est de déployer par la suite cet outil à plus grande échelle, auprès des commissaires de justice qui le souhaitent, dès que nous aurons validé l’ensemble des protocoles.
A quels types de biens ce double numérique est-il destiné ?
La définition est pour le moment relativement large. Notre produit s’applique à des biens qui réunissent deux critères : la valeur, bien que relative, et la durabilité de l’objet. Cette deuxième notion est tout aussi importante : l’objet doit avoir une vie longue, être passé de main en main et prétendre au second marché. Les produits sont très divers. Il peut s’agir de tout objet que l’on retrouve dans une vente aux enchères, des œuvres d’art aux meubles, bijoux ou bouteilles de vin. Des objets de collection, d’art et de luxe, en définitive. Mais l’on peut élargir ce périmètre, avec les objets technologiques comme les ordinateurs qui ont parfois une durée de vie de 5 à 10 ans et donc une valeur sur le second marché. Il pourra être intéressant pour l’acquéreur de connaître l’histoire de cet objet : les réparations et propriétaires successifs.
Quel est l’intérêt pour l’acquéreur d’un objet de valeur d’obtenir son double numérique ?
L’intérêt est multiple. Au contraire d’un certificat délivré sous la forme d’un document papier, le double numérique apporte une garantie de conservation. S’il est perdu, le propriétaire peut demander à ce qu’il soit émis de nouveau. Les informations que contient le double numérique sont stockées, tracées, horodatées et certifiées par le commissaire de justice. L’authenticité est ainsi assurée et vérifiable au moment de la revente. Le double numérique permet de valoriser l’objet, en prouvant son pedigree. Ce double numérique est également un support intéressant pour des services comme l’assurance. L’assureur dispose de toutes les informations nécessaires à l’établissement du contrat. Enfin, notre outil est aussi intéressant d’un point de vue logistique. Le propriétaire peut en effet horodater des changements de lieux, ce qui sécurise par exemple les éventuels prêts aux musées. Le prêteur pourra vérifier au retour de son objet qu’il n’a pas été altéré.
Quelles informations contient ce double numérique ?
Toutes les informations qui concernent l’objet en tant que tel, à savoir des photos, des certificats, des descriptions, des rapports de condition… En somme, tous les éléments qui sont mentionnés au moment d’une transaction. Ensuite, il contient des informations sur la vie de l’objet, comme ses éventuelles restaurations. Par exemple, si je fais restaurer ma commode, je vais pouvoir de façon dynamique faire évoluer le double numérique en intégrant ces nouvelles informations. Enfin, le propriétaire pourra également y intégrer un historique des prix. Le double numérique est à la fois la carte d’identité et la carte d’entretien d’un objet physique.
Quel coût représente un double numérique ?
Il représente un coût tout à fait modique, car les frais de transactions sur la blockchain Legide sont très faibles. Il est en effet possible de le vendre à quelques euros seulement, alors qu’il est un gage de confiance pour les acquéreurs.
Concrètement, que recevra l’acquéreur à l’issue de la vente aux enchères ?
Il reçoit un mail qui lui permet de récupérer son double. Il pourra ensuite se créer un compte, avec un identifiant et un mot de passe. Il peut également décider de laisser son double aux mains du commissaire-priseur et ne le demander que lorsqu’il le jugera utile. C’est aussi une façon pour les professionnels de conserver un lien avec leurs clients.
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