
Andromède par Fantin-Latour : une toile symboliste aux enchères à Senlis
Henri Fantin-Latour, le premier des symbolistes ? Le 29 octobre à l’Hôtel des ventes de Senlis, une toile représentant Andromède révèle un pan méconnu de la carrière de Fantin-Latour qui, à la fin de sa vie, n’exposa plus que des œuvres d’imagination.
S’il est célébré pour ses natures mortes et portraits, de veine réaliste, Henri Fantin-Latour (1836-1904) laisse à la fin de sa carrière libre cours à son imagination. L’artiste qui, proche du groupe impressionniste, demeurait jusqu’alors attaché à la restitution fidèle de la réalité, n’expose, à partir de 1890 au Salon, plus que des œuvres d’imagination – « Je ne fais plus de fleurs. Je puis, grâce au ciel, faire ce qui me plaît », confie-t-il. De ce pan méconnu de sa carrière, une vente aux enchères organisée par Dominique Le Coënt-de Beaulieu le 29 octobre à Senlis révèle une Andromède peinte en 1896. Cette œuvre symboliste, répertoriée au Catalogue de l’œuvre complet de Fantin-Latour, n’a été présentée sur le marché qu’à deux reprises, en 1901, lors de la dispersion de la collection Bernard, et en 1909, lors de la vente de la collection d’Henri Darasse.
Fantin-Latour et les œuvres d’imagination
A ces féeries, Fantin-Latour consacre une première œuvre à l’âge de 19 ans : Le Songe, une esquisse datée de 1854. Mais l’artiste ne révèle au public cette première œuvre d’imagination que trente-cinq ans plus tard, livrant une version au pastel pour le Salon de 1889, avant d’exposer une peinture à l’huile au Salon de 1893. Ses travaux d’imagination ne font l’objet que d’esquisses jusqu’en 1876, date à laquelle il réalise, en hommage à Berlioz, L’Anniversaire, un tableau abouti dans lequel la fantaisie pure prend pleinement le pas sur la réalité. Quatre ans plus tard, la musique, le rêve, la mythologie deviennent dès lors les sources d’inspiration privilégiées de l’artiste qui sublime le corps féminin, au gré d’une touche vaporeuse. Ici, la mythologique grecque avec la princesse Andromède qui, enchaînée nue à un rocher, attend d’être délivrée par Persée.

Henri Théodore Fantin-Latour (1836-1904), « Andromède », 1896, huile sur toile, signée en bas à droite et numérotée 4709 au dos. 46,5 x 28.5 cm. Estimée entre 10 000 et 15 000 euros.
Une toile représentant Andromède
Pièce maîtresse de la vente des Trésors d’Actéon, notre Andromède précède d’un an La Nuit, la seconde œuvre de Fantin-Latour acquise par l’Etat. Cette dernière, aujourd’hui conservée au musée d’Orsay, fut saluée par la critique lors de son exposition au Salon de 1897, Gustave Geoffroy ne tarissant pas d’éloge à son égard : « La Nuit : jamais corps de femme ne reposa plus doucement dans un ciel de peinture sur les nuées souples et enroulées comme des vagues ». Comme La Nuit, notre Andromède arbore une silhouette évanescente, tandis que sa chevelure mordorée répond à la lueur orangée des premiers rayons qui, dans la pénombre, poignent à l’horizon. Fantin-Latour restitue en d’infinies nuances le caractère vibrant de la lumière, au gré d’une touche vaporeuse évoquant volontiers la technique de grattage dont il use au sein de ses œuvres lithographiques.
Fantin-Latour, le premier des symbolistes ?
Fantin-Latour : le dernier des romantiques pour les uns, le premier des symbolistes pour les autres… « Un artiste intense, doué d’une sensibilité à fleur de peau », résumaient quant à eux les commissaires de la rétrospective qui, en 2017 au musée du Luxembourg à Paris, révélait un peintre singulier, avançant à contre-courant des aventures collectives pour n’adopter, peut-être, qu’une seule école, celle de la poésie…