Dans l’intimité des Offenbach
Mise à jour du 26 septembre 2017 : la vente a été un succès. Les toiles de Pierre-Joseph Mousset ont été adjugées jusque 31 000 euros, le salon italien a trouvé preneur pour 10 000 euros, tandis que de nombreux acheteurs ont pu repartir avec des souvenirs de cette illustre demeure dès 10 euros. Aux portes de Paris, à Saint-Mandé, une demeure bourgeoise de style Napoléon III raconte encore l’histoire, vieille de 150 ans, d’une glorieuse famille qui marqua l’histoire des arts. Là, Jacqueline Offenbach (1858-1936), fille du célèbre compositeur Jacques Offenbach (1819-1880), s’installa avec son mari le peintre Pierre-Joseph Mousset (1850-1894). Elle y conserva les livrets d’opéra, une malle de voyage, les partitions, les médailles et les portraits de son père, tandis que son compagnon y réalisa quelques-uns de ses plus beaux chefs-d’œuvre. Gardés précieusement, ces souvenirs émouvants, ces peintures orientalistes, ces meubles et objets accumulés au fil des générations quitteront leur écrin samedi 23 septembre 2017 : sur place, Maîtres Géraldine d’Ouince et Etienne de Baecque disperseront aux enchères le complet mobilier. Une occasion unique de découvrir ce foyer familial où plane encore l’ombre du musicien…
Les souvenirs intimes de Jacques Offenbach
La vente regorge d’archives qui évoquent la carrière et la vie de celui à qui l’on doit les premiers opéras bouffes français, tels que Orphée aux enfers composé en 1858. D’origine allemande, Jacques Offenbach passa la majorité de sa vie à Paris, où il devint un compositeur et un violoncelliste célèbre, avec La fille du sergent-major (1879) ou Les Contes d’Hoffmann (1881). « L’essentiel du mobilier appartenait à Jacqueline Offenbach. La jeune femme entretenait une relation privilégiée avec son père, qu’elle admirait, explique Maître Géraldine d’Ouince. Elle a rassemblé ses carnets de musique, ses livrets d’opéra et de nombreux documents qui lui appartenaient. »
Ces précieux témoignages se découvrent à mesure que l’on parcourt les livres dédicacés ou les partitions annotées. « En préparant la vente, nous avons redécouvert des objets dont les descendants ne se souvenaient même plus. » Glissé secrètement dans une partition de la tragédie Alceste mise en musique par Jean-Baptiste Lully, un bifeuillet autographe recueille ainsi quelques-unes des notes manuscrites de Jacques Offenbach. Des tableaux oubliés, des objets insoupçonnés sont alors remis au jour à la surprise des héritiers.
Le mobilier éclectique d’un couple d’érudits
« La maison est restée la même depuis le XIXe siècle. Peu d’éléments ont été ajoutés par les générations successives. » Il est alors aisé d’imaginer le musicien fouler la salle à manger en noyer ou s’accouder à la console en acajou. Mais à travers le mobilier, on découvre surtout le raffinement de Jacqueline Offenbach et Pierre-Joseph Mousset, très au fait des dernières tendances, comme en témoigne le salon italien composé d’un spectaculaire mobilier marqueté du XIXe siècle, attribué à Ferdinand Pogliani et estimé entre 8 000 et 10 000 euros.
« Ce couple d’érudits s’intéressait aux courants à la mode et n’achetait pas leur mobilier et objets au hasard. Leurs choix traduisent une grande curiosité et un goût pour l’exotisme. » Un cache-pot attribué à Gabriel Viardot (1830-1904) (estimé entre 400 et 600 euros) évoque ainsi l’art asiatique, et côtoie un plat tabak d’origine turque (estimé entre 1 500 et 2 000 euros) et un petit buffet de style Henri II (estimé entre 100 et 150 euros).
L’écrin théâtral de Pierre-Joseph Mousset
Ces objets mobiliers s’immiscent aussi dans les œuvres de leur propriétaire. « Nous avons découvert que Pierre-Joseph Mousset reproduisait dans ses huiles de nombreux objets et meubles de la maison. Les tableaux seront donc vendus à côté du mobilier qui leur servait de modèle ! » Avec neuf toiles estimées entre 100 et 5 000 euros, la vente est l’occasion de redécouvrir l’œuvre de cet artiste de l’école académique de la fin du XIXe siècle. « Pierre Mousset exposait au Salon mais ne cherchait pas particulièrement à vendre. Ses œuvres ne passent donc que très rarement sur le marché. »
Des nus à l’antique et des gracieuses odalisques côtoient des portraits de jeunes africains ou paysages orientaux, témoignant d’une oeuvre éclectique, dans l’air du temps et marquée par la vogue orientaliste. « Ces nus féminins sont représentés plus grands que nature. Ils habillaient les murs d’une chambre cathédrale, construite sur une terrasse de 7 à 8 mètres de hauteur et composée d’un lit à baldaquin gigantesque de style Renaissance. »