Le 29 février 2024 | Mis à jour le 19 mars 2024

La magie des Kachinas : une collection de 24 poupées aux enchères à Rennes

par Magazine des enchères

Liées à des danses et à des cérémonies spirituelles, les poupées Kachina sont des souvenirs des traditions Hopis d’Amérique du Nord. Découvrez les secrets de ces figurines sculptées dont la maison Rennes Enchères présentera le 11 mars prochain 24 exemplaires issus de la collection de Thierry Boutemy, l’un des artisans-fleuristes les plus prisés au monde.

 

[Mise à jour, 19 mars 2024] La Kachina Ho-o-te, estimée entre 15 000 et 18 000 euros, a changé de main pour 33 750 euros (frais inclus). 

 

Hautes d’une cinquantaine de centimètres au maximum, réalisées en cotton wood (une variété de peuplier), affublées de plumes et colorées de bleu, de blanc ou de jaune : les poupées Kachina paraissent bien mystérieuses pour des yeux profanes. « Elles viennent de la tribu Hopi du nord de l’Arizona, et servent à enseigner aux non initiés, principalement les plus jeunes, les danses et cérémonies qui rythment le quotidien. Un peu comme des livres pour enfants », avance l’expert Laurent Dodier. Ces rituels impliquant les Kachinas ont lieu entre le solstice d’hiver et le solstice d’été, il en existe plus de trente au cours desquels les esprits sont incarnés par des danseurs masqués et costumés à l’image des Kachinas.

Laurent Dodier a expertisé pour la maison Rennes Enchères Bretagne les 24 poupées Kachina de la collection Thierry Boutemy qui figurent au catalogue de la vente du 11 mars prochain : « Il est vraiment rare d’en voir autant d’exemplaires en une seule fois, Thierry Boutemy a parcouru un très long chemin pour les rassembler. Cette année, la seule autre occasion d’en voir était sur le stand de la galerie Falk à la Brafa ». Résidant à Bruxelles, Thierry Boutemy est plus connu pour ses talents d’artisan-fleuriste. Il a en effet travaillé pour de grands noms de la mode, d’Hermès à Lanvin, pour des tournages de film, à l’instar de Marie-Antoinette de Sofia Coppola, et pour de nombreuses stars comme Lady Gaga.

 

Un art qui remonte au XIVe siècle

Historiquement, l’existence des Kachinas est avérée depuis le XIVe siècle environ, mais la période la plus intéressante se situe entre les années 1880 et 1920. Les premières Kachinas sont plates et peu décorées, sans jambes, et le travail s’est affiné et sophistiqué avec les années. Dans la collection Boutemy, la plus ancienne datée avec précision est Ho-o-te, modèle lié à la danse du serpent durant la fête du Niman. Elle a été collectée en 1898, acquise par un musée, puis par une galerie, avant de rejoindre la collection. Après les années 1920, l’expert estime que « cet art devient décadent, il est tourné vers le commerce ».

Avant ces années-là donc, les poupées Kachina représentent à la fois les esprits de la mythologie Hopi et leurs fonctions. Chaque détail a son importance : sur la Palhik Mana (4 000 à 6 000 euros), deux épis de maïs figurent de bonnes récoltes, encouragées par la pluie qui orne les joues sous la forme de chevrons rouges. Le Sikya Heheya (3 500 à 4 500 euros), qui porte aussi le nom d’ogre jaune est connu pour menacer les enfants et mal se comporter jusqu’à ce que l’ogresse, sa femme, le réprimande. La Kachina Tête de boue (600 à 800 euros) est plus joyeuse puisqu’il s’agit d’une représentation de clown demandant aux fillettes de concasser du maïs pour en goûter la farine. Et la Püch Tihu (1 000 à 1 500 euros) est destinée aux jeunes femmes qui souhaitent avoir des enfants.

 

 

« Les Kachinas sont traditionnellement fabriquées par des chamans, dont c’est le métier, et qui réalisent chaque statuette en fonction des codes connus des Hopis. Leur nom a toujours une signification, lié au pouvoir de la poupée et à la danse ou la cérémonie à laquelle elle est liée », détaille l’expert. Les couleurs sont associées aux six points cardinaux, jaune pour le nord, belu vert pour l’ouest, rouge pour le sud, blanc pour l’est, et le noir pour le zénith et le gros pour le nadir (à l’opposé du zénith donc vers le sol).

Les chamans peuvent également ajouter quelques accessoires à leurs œuvres, souvent des plumes d’oiseaux rares (cygne siffleur, oie bernache, dindon bronzé d’Amérique…), ou même des poils d’ours noir pour lesquels la maison de vente Rennes Enchères a fait établir des certificat d’importation CITES.

 

Les Kachinas, des poupées prisées des surréalistes

Thierry Boutemy n’a pas été le premier à s’intéresser à ces poupées. Avant lui, les surréalistes tels qu’André Breton (elles figuraient dans la vente de sa collection en 2003 à Paris), Max Ernst ou Marcel Duchamp ont également collecté ces figurines mystérieuses. Et leur histoire a été largement étudiée dans un livre (aujourd’hui épuisé) de plus de 400 pages paru aux éditions Amez.

« Les Kachinas exposées à la Brafa valaient d’après mes informations entre 5 000 et 50 000 euros environ, mes estimations sont donc vraiment raisonnables, ajoute Laurent Dodier. Il s’agit plutôt de prix de départ, sur un marché qui reste vraiment réduit au vu du très faible nombre de pièces changeant de mains chaque année ».

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