Le 29 novembre 2016 | Mis à jour le 5 décembre 2016

Le Grand Fourmilier : un record pour Bugatti

par Magazine des enchères

20161129-bugatti

Mise à jour du 5 décembre 2016

Le Grand Fourmilier signé par Rembrandt Bugatti (1884-1916) a été adjugé par la maison Crait + Müller 1,2 million d’euros le 2 décembre 2016 à Paris. L’estimation basse de ce bronze, fixée à 600 000 euros, a ainsi été multipliée par deux lors de cette enchère, qui entérine un record d’adjudication pour l’artiste.
.

.

Une œuvre emblématique

« Sois rosse avec les hommes et bon avec les bêtes », intimait Rembrandt Bugatti à son frère, dans l’une de ses lettres. L’artiste avait beau côtoyer les grands esprits de son temps (Apollinaire, Picasso, Derain…), il n’en restait pas moins un farouche misanthrope. Et c’est dans la représentation du règne animal qu’il l’exprima. Le Grand fourmilier, réalisé en 1909, est emblématique de l’attrait de Bugatti pour les animaux, qu’il croquait sur le vif  à la Ménagerie du Jardin des Plantes à Paris ou au zoo d’Anvers. « Il s’agit d’une œuvre mythique », commente Maître Thomas Muller, qui assurera la vente. « Il en existe seulement cinq exemplaires, et celui-ci n’est jamais passé en vente auparavant. »

.

Fascination animale

20161129-bugatti-03Le Grand fourmilier est en effet une sculpture majeure qui se trouve au confluent de tous les courants qui traversent la carrière de Rembrandt Bugatti, celui-ci en référant tantôt à la tradition du portrait animalier, en vogue dans l’art occidental depuis la Renaissance (Dürer, Desportes, Barye…), tantôt aux courants plus actuels de son époque (futurisme, primitivisme). Le Grand fourmilier est en ce sens à rapprocher de ses autres créations (colosses, babouin, fauves).

.

Contorsion des formes…

C’est grâce à la plastiline, une pâte à modeler contenant du soufre inventée à Gênes au XIXe siècle, que Rembrandt Bugatti parvenait à conférer à ses portraits un aspect mouvementé, visant à figer les attitudes les plus incongrues dans un geste d’immobilité. Cette source de libération formelle permit ainsi à l’artiste de se soustraire aux contraintes de la matière, et de faire de son art, dès lors, une quête synonyme de recherche de la liberté. Le succès fut immédiat du vivant de l’artiste, notamment grâce à la collaboration exclusive qu’il engagea avec le fondeur Adrien-Aurélien Hébrard : celui-ci fut en effet l’un des premiers à limiter et à numéroter les éditions de bronzes. De quoi assurer aux jeunes talents un succès commercial inégalé, au bénéfice de la loi du marché.

 

… Contorsions de l’âme

20161129-bugatti-02Comme dans un grand arc-de-cercle, Le Grand Fourmilier se ploie et vient frotter sa patte arrière, à la façon d’un acrobate sur son fil. Un exercice d’équilibre et d’agilité qui passerait presque pour ironique, quand on sait que cette espèce est l’une des plus passives du règne animal (le fourmilier dort en moyenne 10 à 15 heures par jour). Ce même goût du paradoxe formel se retrouve dans d’autres œuvres de Bugatti, à commencer par le célèbre éléphant dressé sur ses pattes arrières, que reprendra son frère Ettore pour en faire l’image de marque de sa fameuse automobile « Bugatti royale ». Une fascination animale qui en tous les cas en dit long sur l’artiste lui-même, car la correspondance entre les portraits animaliers de Bugatti et sa psychologie torturée ne peut manquer d’intriguer. Ce n’est peut-être pas pour rien que l’artiste, qui se suicida à l’âge de 31 ans, s’intéressa avant tout aux animaux emprisonnés dans les zoos.

.

Lien vers l’annonce de vente aux enchères de ce lot

.

Enregistrer

Haut de page

Vous aimerez aussi

Louise Bouteiller, découverte d’une grande artiste

Le 21 janvier 2025 | Mis à jour le 21 janvier 2025

Après Louise Moillon et ses natures mortes, c’est peut être au tour de Louise Bouteiller de connaître la célébrité, presque 200 ans après sa mort. La vente organisée par la […]