Plus écorchés que vifs
Le nom du Docteur Auzoux ne vous dit peut être rien. Pourtant, le génie de ce médecin français est internationalement connu en tant que concepteur de modèles anatomiques aux pièces détachables utilisés dans l’enseignement de la médecine, plus connus sous le nom d’ « écorchés ». Deux de ces archétypes humains sont mis aux enchères le samedi 30 novembre 2013 à la Galerie de Chartres. Avis aux passionnés d’anatomie et autres collectionneurs de curiosités !
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Deux écorchés humains en papier mâché montés sur socle ont leurs orbites découvertes fixées droit devant eux. Une fois la cage thoracique détachée du buste, ces deux modèles d’un mètre vingt de haut offrent une représentation en trois dimensions de la composition complexe de l’anatomie humaine. Le premier modèle est composé de 21 morceaux détachables regroupant la plupart des organes vitaux tandis que le second ne possède qu’une dizaine d’éléments mobiles. Sur chacun d’entre eux, deux zones peuvent être ouvertes : la boîte crânienne et l’abdomen, permettant ainsi une meilleure appréhension du corps humain dont chacun des organes et muscles sont répertoriés par de petites étiquettes de papiers collées. Estimés 7 000 euros pour le premier et 3 500 euros pour le second, ce duo mis à nu provient du cabinet de curiosités d’un collectionneur féru de sciences et passionné d’anatomie.
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Objets insolites et pourtant connus de tous, ces modèles anatomiques représentent une des révolutions de la sphère scientifique du début du XIXe siècle progressiste. C’est en 1822 que la secousse s’opère à Paris : Louis Auzoux (1797-1880), futur docteur, présente à l’Académie royale de Médecine son tout premier modèle d’anatomie représentant une partie du corps humain. Deux ans plus tard, le Ministre de l’Intérieur le charge de fabriquer une pièce complète. Si plusieurs techniques de représentation anatomique existent déjà (sculptures, moulages de cire, etc.), le génie de l’invention d’Auzoux est de créer un prototype simple, peu couteux et très maniable. A travers une pâte composée de colle de farine, de papier déchiré, de blanc de Meudon, un produit à base de craie et de poudre de liège, le jeune docteur invente un procédé solide permettant de produire une pièce précise dans les détails. Une fois les vaisseaux et fibres musculaires soigneusement tracés au pinceau, une couche protectrice de colle de vessie de poisson de Russie recouvre la structure assemblée par des petits clous métalliques.
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Suite au succès de ce procédé technique, le scientifique crée sa propre usine à Saint-Aubin-d’Ecrosville, son village natal en Haute-Normandie. La production en masse des ces créations permet une large exportation internationale de ses modèles. L’homme clastique, du grec klastos (mis en morceaux), lui permet même de se faire décorer chevalier de la Légion d’Honneur en 1833. Les écorchés du docteur Auzoux deviennent alors des symboles du progrès de l’anatomie descriptive mais également sujet à des collections insolites. Dans la ville de Neubourg, sa région natale, un musée est même consacré à la célébration de cet artisanat scientifique, un patrimoine formant encore des générations de médecins à travers le monde.
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D’autres créations du docteur sont proposées lors de la vente organisée par la Galerie de Chartres. Le samedi 30 novembre 2013, passionnés de médecine ou simple collectionneurs à la recherche d’objets de cabinets de curiosités pourront également se procurer plusieurs parties du corps reproduites en grand format. Une vacation passionnante qui propose un cœur accompagné de son système vasculaire, un encéphale ainsi qu’un ensemble oculaire qui vaut le coup d’œil (respectivement estimés 2 000, 1 500 et 1 000 euros).
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Lien vers l’annonce de la vente