Le 29 avril 2025 | Mis à jour le 7 mai 2025

Un tableau inédit peint par Moïse Kisling en exil dévoilé aux enchères à Montpellier

par Diane Zorzi

Un tableau inédit peint par Moïse Kisling lors de son exil à Marseille en 1940 sera l’une des pièces maîtresses de la vente Les Phares organisée par la maison Farran le 4 mai à Montpellier.

 

[Mise à jour, 5 mai 2025.] Le tableau de Moïse Kisling a été adjugé 109 000 euros (frais inclus) lors de la vente « Les Phares » organisée par la maison Farran le 4 mai à Montpellier. Lors de cette vacation, 95% des lots ont trouvé preneur et une Tête de faune sculptée par Paul Dardé (1888-1963) a été préemptée pour 12 400 euros par le Musée Fabre. 

 

« Pour ce quatrième volet des Phares, annoncent les commissaires-priseurs, la petite rencontre la grande Histoire ». Nous sommes en 1940 et Moïse Kisling (1891-1953), fuyant les persécutions antisémites, « commence de rentrer en plein dans le bain de Marseille ». Au gré d’une riche correspondance, le peintre originaire de Cracovie conte son nouvel exil à son ami et mécène Louis Thène. Sur les conseils d’André Salmon, qui le prévient du danger qu’il court pour ses activités antinazies, il s’est réfugié à Marseille, dans l’espoir de quitter le territoire. Il rejoindra bientôt le Portugal, puis les Etats-Unis où il s’établira loin de sa famille jusqu’à la fin du conflit. « Durant son court séjour à Marseille, il peint quelques tableaux remarquables », détaille l’expert Marc Ottavi, mentionnant pour exemple l’une des œuvres phares de la vente orchestrée le 4 mai par la maison Farran : Bohémienne et son enfant. 

 

Moïse Kisling (1891-1953). Bohémienne et son enfant. Huile sur toile signée, datée 1940 et située à Marseille en bas à gauche. Haut. : 100 – Larg. : 81 cm. Estimée entre 80 000 et 120 000 euros.

 

Bohémienne et son enfant, une émouvante maternité

Lorsqu’il ne dépeint pas un bouquet de fleurs ou un nu, Moïse Kisling jette son dévolu sur quelques protagonistes rencontrés au hasard des rues. Ainsi les bohémiens lui servent-ils volontiers de modèles. « Kisling se plaît à représenter ces errants perpétuels, fruit d’une antique migration. On retrouve dans ses ses illustrations de « L’Épopée bohémienne » sa fascination pour ce peuple étrange, mystérieux, farouche et intuitif », détaille Marc Ottavi. A ses portraits, Kisling insuffle la palpitation de la vie – l’artiste ne se contente pas de rendre compte des traits de ses modèles, il sonde les profondeurs de l’âme. « Sans s’écarter de la réalité, Kisling ne peint pas un visage, il l’interroge pour ajouter à l’apparence, le sentiment et le ressenti. Sa peinture chargée d’une émotion particulière révèle un drame imperceptible transmis par la pose, l’attitude ou le regard du personnage représenté », poursuit Marc Ottavi.

Ici, il efface volontairement les traits de sa protagoniste, pour mieux souligner l’objet de toute son attention, une fillette qu’elle tient en majesté – la Bohémienne de Moïse Kisling a l’aura d’une Madone à l’enfant. « Kisling ajoute à sa peinture ce qu’il perçoit, ressent et subodore, décrit encore l’expert. Dans notre tableau, la fillette est l’objet de toute l’attention de sa mère qui la regarde tendrement. Elle est à l’évidence son bien le plus précieux et le plus cher à son cœur. Peu importe le dénuement, un lien indéfectible les unit ».

 

Un tableau inédit sur le marché

Ce tableau émouvant séduisit Louis Thène qui en fit immédiatement l’acquisition, s’attirant les foudres de Renée, l’épouse de Kisling qui, dans une lettre qu’elle adresse au collectionneur, lui fait part de son regret quant à la destination de l’argent de cette vente, qui sert davantage à l’artiste à financer ses fréquentations de prostituées. « Au fond vous avez raison je ne suis qu’un « fétard » – je prefère ça que « salaud » – Vous voyez comme je me juge sévèrement ! Je ne sais pas si j’ai besoin toutes ces filles pour faire la fête mais je sais une chose que je vis par elles et que je ne pourrais pas faire de la peinture sans elles », se justifie ainsi Moïse Kisling au sein d’une lettre adressée à Louis Thène, témoignant ainsi des liens intimes qu’entretenaient les deux hommes. Le tableau n’a depuis jamais quitté la collection familiale et sera présenté pour la première fois aux enchères le 4 mai à Montpellier, avec une estimation de 80 000 à 120 000 euros. Il compte parmi les pièces maîtresses de la vente de la maison Farran qui présente, entre autres trésors, un portrait remarquable de John White Alexander (1856-1915) qui, lors de la première rétrospective de l’artiste, fut considéré comme l’une des œuvres les plus importantes réalisées à Paris en 1900 par ce peintre américain présent dans les collections du musée d’Orsay. 

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