
Une collection d’art asiatique découverte dans un manoir abandonné près d’Angers
Deux découvertes étonnantes animeront la prochaine vacation orchestrée par la maison Deloys le 14 juin à Angers : une collection d’art asiatique qui sommeillait dans un manoir abandonné et un élément de retable inédit du XVe siècle retrouvé dans une propriété de la région. Décryptage.
Le commissaire-priseur Florian d’Oysonville n’imaginait sans doute pas qu’à quelques kilomètres de son hôtel des ventes d’Angers sommeillaient depuis plusieurs années les œuvres d’un collectionneur d’art asiatique, que la passion mena au Japon, en Chine et au Moyen-Orient. Il faut dire qu’elles ne bénéficiaient pas de l’écrin qui leur incombe. C’est en effet à l’ombre d’un manoir abandonné que devaient ressurgir ces trésors du passé, dont la pièce maîtresse est de taille… Il s’agit en effet d’une importante encre sur soie chinoise du XVIIIe siècle mesurant 1,7 mètre de hauteur (30 000 – 40 000 euros). Représentant Le roi des Enfers, elle porte le cachet du prince Zhuang, issu de la dynastie Qing (1644-1912). Au catalogue de la collection figurent également un coffre (1 000 – 1 200 euros), une console (3 000 – 4 000 euros) et une armoire (500 – 600 euros) chinoises d’époque XIXe siècle, autant d’œuvres qui composeront la vente de la maison Deloys prévue le 14 juin à Angers.

Chine, XVIIIe siècle. Importante encre polychrome sur soie, le roi des enfers (Yanmoluo Wang Zuntian). Signature en bas à droite : Heshuo Zhuang Qinwang Faxin Chengzao (commandé pieusement par le prince Zhuang) et suivi du cachet du prince Zhuang. (Taches, manques, pliures). Dim. 173 x 91,5 cm. Estimation : 30 000 – 40 000 euros.
Un élément de retable peint à Valence au XVe siècle
Autre collection, autre chef-d’œuvre… La vente Deloys révèle une autre découverte étonnante, celle d’une œuvre inédite peinte à Valence, en Espagne, durant la seconde moitié du XVe siècle. Retrouvée dans une propriété près d’Angers, l’œuvre, impressionnante par ses dimensions (129,9 x 63,7 cm), est un élément de retable inconnu, représentant Saint Mathieu et l’Ange. A l’issue de recherches menées par les experts du cabinet Turquin, le tableau a été attribué au binôme qui dominait la scène artiste de l’époque : Jaime Baço dit Jacomart (1410-1461) ou son émule Joan Reixach (actif à Valence 1431-1486). « Pendant très longtemps on les a considérés comme travaillant de manière indépendante. Pourtant les récents éléments documentaires publiés en 2012, tendraient à prouver qu’ils furent associés dès 1449 et que lorsqu’ils travaillaient à la même œuvre, leur style tendait le plus souvent à s’harmoniser », détaillent les commissaires-priseurs.

Jaime Baço dit Jacomart (1410-1461) ou son émule Joan Reixach (actif à Valence 1431-1486). « Saint Mathieu et l’Ange », panneau de retable, peinture mixte et fond d’or sur panneau de bois rectangulaire, cadre en bois doré et sculpté non d’origine.
H. 143 – L. 84 cm (hors tout) – H. 129,9 – L. 63,7 cm (panneau seul) – H. 126,6 – L.59,9 cm (surface picturale). Estimation : 50 000 – 70 000 euros.
Jacomart travailla dans la région de Valence et à Naples, principalement au service des dignitaires que furent Alfonso Borgia, le futur pape Calixte III (1378-1458) et Alphonse V le Magnanime (1394-1458) roi d’Aragon, de Sicile et de Naples, dont il fut le peintre de cour attitré. Quant à Joan Reixach (documenté de 1431 à 1486), bien qu’originaire de Catalogne, son activité se déroula principalement à Valence où il s’établit en 1437 jusqu’à sa mort en 1484. La seule œuvre certifiée que l’on connaisse de lui est le retable de Sainte Ursule signé et daté 1468, autrefois dans l’église paroissiale de Cubells (Catalogne) conservé actuellement à Barcelone (Museu Nacional d’Art de Catalunya). « Notre œuvre se rapproche du retable réalisé pour l’église paroissiale de Cati, parvenu jusqu’à nous, commandé à Jacomart en janvier 1460, qui fut terminé par Reixach suite à la mort de Jacomart », précisent les experts, annonçant une estimation de 50 000 à 70 000 euros.