
Expertise : un coffre bombé du XVIe siècle
Le coffre dit « bombé » ou « arche », reconnaissable à son couvercle galbé, est apparu des milliers d’années avant le XVIe siècle, époque à laquelle est pourtant répertoriée son invention en Europe. D’abord exécuté en chêne, il arbore au XVIe siècle une structure en bois de noyer. Jacques Dubarry de Lassale décrypte les particularités de ce meuble de voyage à travers l’expertise d’un modèle du XVIe siècle originaire du centre de la France.
Si le coffre à dessus bombé, également désigné « arche », est répertorié parmi les inventions européennes du XVIe siècle, il existait bien avant cette époque. En effet, un coffre de ce type a été découvert dans la tombe d’un pharaon. Le modèle que nous allons étudier (photo 1 ci-dessous) peut quant à lui être daté du XVIe siècle. Il est effectivement composé d’une structure en bois de noyer, au contraire des modèles plus anciens réalisés en chêne et dotés d’une serrure à bosse. Le montage de la caisse est également typique de la technique utilisée au XVIe siècle. En outre, ce coffre provient du centre de la France, mais son dénuement décoratif ne permet pas de distinguer plus précisément son origine et sa date de fabrication.

Photo 1 : Coffre vu de face. Largeur : 114 cm, profondeur : 48 cm, hauteur : 76,5 cm. On remarquera la réparation rudimentaire du pied avant droit et le bout de pied manquant à l’arrière gauche.
Analyse de la construction
Ce coffre est constitué d’une large planche pour la façade, d’une autre pour le dos ainsi que pour le côté droit, de deux autres pour le côté gauche et enfin de deux planches pour le fond. A cet ensemble s’ajoutent deux planches pour la partie fixe du couvercle, trois planches pour la partie mobile du couvercle, une planche pour chaque côté de la partie mobile du couvercle et pour finir quatre pieds tournés. Les planches constituant le dessus du couvercle sont fixées sur celles des côtés par des chevilles dont la tête est recouverte par des ferrures. Ces ferrures articulées font office de charnières pour le couvercle et sont fixées par des clous forgés (photo 7).
Les quatre côtés du coffre sont embrevés dans des pieds tournés et assemblés à tenons et languettes chevillés (croquis 1). La base du pied est constituée d’une partie de section carrée reposant sur une boule. Cette partie cubique du pied est creusée d’une large rainure dans laquelle venait s’encastrer une moulure rapportée à la base du coffre sur la façade et sur les côtés (photo 4). Cette moulure, qui a disparu, fixée par des chevilles sur les planches de façade et des côtés, se raccordait à coupe d’onglet dans les angles des deux pieds avant. Le sciage des planches est bien entendu manuel (photo 10). Les traces sont éloquentes et bien visibles à l’intérieur, alors que les quatre faces extérieures sont parfaitement bien rabotées. Le fond est embrevé dans les quatre côtés par des rainures et languettes bâtardes (croquis 2). Le raccord de la partie mobile du couvercle sur la partie fixe est assuré par une feuillure sur les quatre côtés (photo 9). Des traces de rabot rond sont parfaitement visibles à contre parement dans le couvercle (photo 9).
La ferronnerie
Il est très important, lors de l’expertise d’un meuble, de bien examiner la ferronnerie qui, souvent, apporte des indications précieuses. Le fer doit être battu à la forge, fixé avec des clous forgés et l’ensemble doit être homogène. C’est le cas ici (photo 7). Les ferrures d’assemblage des planches du couvercle servent aussi de charnières (photos 3 et 7). Les poignées de transport, situées sur les côtés, sont d’une extrême simplicité (photo 5). La serrure à moraillon, qui a perdu son moraillon (photo 6), a un palâtre sans aucun décor et elle est fixée par des clous forgés. Ce coffre est « dans son jus ». On remarque sur le pied avant droit une réparation rudimentaire (photo 1). Un bout de fer plat fixé par quatre vis maintient un des côtés du couvercle (photo 9). Malgré sa grande rusticité, ce coffre est intéressant en raison de sa rareté.
Photo en Une : Coffre en noyer à dessus bombé, bardé de belles ferrures en volutes. Est de la France, fin XVIe siècle. H. 68, L. 128, P. 47 cm. Adjugé 3 000 euros par Jean Emmanuel Prunier le 28 octobre 2007 à Louviers.
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