Le 22 septembre 2023 | Mis à jour le 25 septembre 2023

Les collections du Palais de la Cathédrale de Saint-Omer vendues aux enchères

par Diane Zorzi

L’entier mobilier et les collections du Palais de la Cathédrale de Saint-Omer seront dispersés aux enchères les 5 et 6 octobre. Ces quelques 800 tableaux, meubles et objets d’art, du XVIe au XXe siècle, ont été réunis durant cinquante ans par le consul de Suède Jean-Luc Montois qui, de 2019 à 2022, a engagé d’importants travaux de rénovation pour réveiller cette demeure emblématique de Saint-Omer.

 

Au cœur des Hauts-de-France, la ville de Saint-Omer invite à un voyage dans le temps. L’ancienne cité drapière conserve maints vestiges de son glorieux passé marchand, à commencer par son joyau gothique, la cathédrale Notre-Dame des Miracles. A l’ombre de ce monument, dont les fondations remontent au XIIIe siècle, une bâtisse étonnante est, depuis 2019, le théâtre des allées et venues de curieux, avides de renouer le temps d’une visite avec la vie d’antan.

 

Le Palais de la Cathédrale, un lieu chargé d’histoire

La demeure, baptisée « Palais de la Cathédrale », a bénéficié d’une restauration d’ampleur menée par son propriétaire, Jean-Luc Montois. Originaire de Lille, ce consul honoraire de Suède est tombé sous le charme de l’édifice alors qu’il cherchait un écrin pour sa collection d’art. « Je n’avais pas envisagé au départ de fixer ma collection à Saint-Omer, confie-t-il, mais c’est la rencontre avec ce bâtiment ancien qui a tout fait basculer ». Ce lieu doit sa configuration actuelle à Etienne Neyrat, un banquier qui, en 1817, décide de regrouper six anciennes maisons de l’administration du chapitre de la cathédrale pour ériger un palais de style pré-Regency, qu’il agrémente de décors luxueux. Un luxe qui causera sa faillite : le Palais passe dès lors de main en main, avant que Jean-Luc Montois ne lui redonne, deux siècles plus tard, son lustre d’antan.

 

 

La demeure, ainsi réveillée, devient une maison-musée que le public est invité à découvrir à l’occasion de visites guidées ou d’événements intimistes. « J’ai toujours pensé qu’il était intéressant d’aller dans les musées, mais rien ne remplace la pratique. Aussi, nous avons ouvert le lieu aux visiteurs. Je leur offrais le thé, et ils avaient la possibilité également d’organiser des réceptions et dîners en utilisant nos collections de porcelaines et orfèvreries. Nous étions, je pense, les seuls à proposer ce type d’expérience en Europe. L’idée était de faire en sorte que le patrimoine puisse se partager de façon simple et spontanée », explique Jean-Luc Montois.

Contraint de déménager pour des raisons familiales, Jean-Luc Montois a décidé de vendre le lieu et les collections qu’il abrite. « Je souhaite que les successeurs s’approprient le lieu à leur manière, le fasse vivre avec leurs propres objets, j’ai donc décidé de vendre également ma collection ». Cette collection fera l’objet d’une vente aux enchères exceptionnelle les 5 et 6 octobre prochains, avec pour dernier écrin, le Palais de la cathédrale. « Les très nombreux objets, sculptures et meubles mis en vente ont l’authenticité des choses anciennes qui n’ont jamais cessé de servir. Scrupuleusement entretenus, ces témoins du passé utilisés au présent, sont arrivés au grès du temps et des générations avec toujours la même exigence de qualité. Ils sont les témoins des échanges entre la France, l’Italie, Les Flandres, l’Angleterre et l’Europe au cours des siècles », annonce Hadrien Fourquet, gérant expert de la SARL l’Hôtel des ventes de Saint-Omer.

 

 

La « passion d’un curieux »

A l’image de son écrin, la collection invite à remonter le temps. Jean-Luc Montois, qui collectionne depuis l’âge de 10 ans, a réuni quelques huit cents tableaux, pièces de mobilier et objets d’art du XVIe au XXe siècle, davantage, sans doute, avec la « passion du curieux », si chère à Maurice Rheims, qu’avec la boulimie obsessionnelle du collectionneur – la quête du Beau rejoint ici celle de la connaissance. « Ces objets n’ont pas été choisis pour leur attrait décoratif, mais parce qu’ils témoignent de la vie, du rapport au Beau et des échanges culturels en Europe, à une époque donnée, reconnaît Jean-Luc Montois. C’est une peinture qui nous parle de la piété en Italie au XVIIe siècle, une assiette en porcelaine de Sèvres qui nous raconte l’art de recevoir au XVIIIe siècle ou un dessin de dandy qui témoigne de l’esthétique masculine au XIXe siècle… »

 

Un ensemble unique dédié à l’art suédois des XIXe et XXe siècles

C’est avec l’appui d’amis historiens de l’art, conservateurs de musées, marchands, experts et commissaires-priseurs, que Jean-Luc Montois a façonné sa collection durant cinquante ans. « J’ai un profond respect pour les marchands, experts et commissaires-priseurs. Leur fonction ne se cantonne pas à la vente. Ils sont en quelque sorte des veilleurs qui, au contraire des musées souvent soumis au dictat de la mode, défendent les artistes oubliés, dont les œuvres disparaîtraient sans leur travail. »

La collection regorge ainsi d’œuvres rares et d’artistes méconnus, à l’instar de Georg Pauli, Gunnar Erik Ström ou Nils Asplund, autant de représentants de l’art suédois des XIXe et XXe siècles. « J’ai vécu en Suède, en tant que consul, et suis marié à un Suédois. J’ai découvert de nombreux artistes suédois qui se sont formés en France, auprès des maîtres de l’école de Barbizon, des peintres impressionnistes ou, plus tard, des artistes de l’avant-garde. Je me suis intéressé à la manière dont ces artistes, formés en France, ont ensuite importé ces sensibilités artistiques en Suède, avant de m’intéresser aux artistes français qui se sont à leur tour intéressés à l’art suédois et notamment au design des pays nordiques, comme Le Corbusier et Charlotte Perriand. »

 

 

Une exposition et une vente in situ

S’il parle avec émerveillement d’un Zéphyr et Flore du XVIIe siècle qui, remarquablement exécuté, cherche encore son maître, Jean-Luc Montois n’hésite pas lorsqu’il s’agit de choisir l’œuvre qu’il chérit le plus au sein de sa collection : ce sera « la prochaine » ! A quelques jours de la vente, cet ami des arts et du patrimoine a le regard porté vers l’avenir et évoque déjà une nouvelle collection autour des gravures des XVIe et XVIIe siècles. « Je suis heureux à l’idée que les objets que j’ai réunis pendant cinquante ans puissent changer de main. De même qu’un acteur rencontre chaque soir un public différent, ils iront jouer leur pièce de théâtre en d’autres lieux… » Du 30 septembre au 1er octobre, ces souvenirs du Palais de la Cathédrale seront exposés une dernière fois in situ, avant de jouer leur dernier acte, en ce même lieu, devant le pupitre du commissaire-priseur. Autant de témoignages qui, estimés dès 10 euros, seront accessibles à tous les curieux… 

Enchérir | Suivez la vente des collections du Palais de la Cathédrale de Saint-Omer les 5 et 6 octobre en live sur interencheres.com

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