
Une toile de Renoir adjugée 182 000 euros à Cherbourg
Les grands maîtres de l’art moderne étaient à l’honneur le 6 août 2018 à Cherbourg et sur le Live d’Interencheres. A côté d’un bord de mer intimiste d’Albert Marquet adjugé 27 500 euros, une huile sur toile inédite aux enchères de Pierre-Auguste Renoir s’est envolée en dix minutes à plus de trois fois son estimation, adjugée 182 000 euros sous le marteau de Maître Samuel Boscher, à l’issue d’une rude bataille opposant un internaute connecté sur le Live d’Interencheres et plusieurs enchérisseurs au téléphone. Provenant d’une collection privée, ce paysage peint vers 1885 était reproduit au catalogue raisonné d’Ambroise Vollard de 1918 qui répertoriait les œuvres encore conservées dans l’atelier de l’artiste à la veille de sa mort.
C’est une vente exceptionnelle qu’organisait Maître Samuel Boscher. Le 6 août 2018 à Cherbourg et sur le Live d’Interencheres, le commissaire-priseur présentait aux enchères une toile de Pierre-Auguste Renoir (1841-1919) peinte vers 1885. « C’est la première fois que je proposais à la vente une œuvre de ce peintre, confie Maître Boscher. Elle dormait jusqu’alors dans le coffre d’un collectionneur privé et m’a été confiée dans le cadre d’une succession. » Mise à prix à 50 000 euros, la toile s’est envolée en dix minutes à plus de trois fois son estimation. Elle a été adjugée 182 000 euros à l’issue d’une rude bataille opposant un internaute connecté en Live qui a poussé les enchères jusqu’à 105 000 euros et plusieurs enchérisseurs au téléphone.
Un paysage peint vers 1885
Le tableau arbore un paysage verdoyant, probablement saisi au fil d’un après-midi ensoleillé à la campagne. Des nuages teintés de touches rosées rythment un ciel bleu étincelant, tandis que le soleil irradie une végétation ponctuée de nuances de verts, jaunes et marrons. « La touche est serrée, lisse, dense, détaille Agnès Sevestre-Barbé, experte en art des XIXe et XXe siècles. Elle est caractéristique du travail plus classique qu’entreprend l’artiste autour de 1885. » Jusqu’au milieu des années 1880, Renoir adopte la touche virgule impressionniste au sein de scènes animées de la vie parisienne. Mais au retour de voyages dans le Midi, en Afrique du Nord et en Italie, le peintre, épris de Raphaël, renoue peu à peu avec la ligne, affirme les formes dans des portraits et paysages au dessin davantage rigoureux et classique. « C’est un porcelainier ! », s’exclamera Paul Cézanne.
« La toile est caractéristique du travail plus classique qu’entreprend l’artiste autour de 1885. »

Pierre-Auguste Renoir (1841/1919), « Paysage, vers 1885 ». Huile sur toile, porte une signature en bas à gauche. 32 x 40,5 cm. Provenance : collection particulière. Adjugé 182 000 euros.
Une toile adjugée à plus de trois fois son estimation
« Renoir a peint de nombreux paysages au cours de sa carrière, poursuit Agnès Sevestre-Barbé. Nous avons donc préféré rester raisonnables quant à l’estimation de ce petit tableau de 32 sur 40,5 cm. Ses portraits, nus et scènes de baigneurs sont plus recherchés et estimés à des montants nettement supérieurs ». Ainsi, alors que le Bal du moulin de la Galette se plaçait encore au début des années 2000 dans le top 10 des tableaux les plus chers de l’histoire des enchères, avec une adjudication à plus de 70 millions d’euros enregistrée à New York en 1990, l’huile sur toile présentée par Maître Boscher à Cherbourg est estimée entre 50 000 et 70 000 euros. Mais le tableau pourrait dépasser son estimation à l’image du Paysage de Provence estimé entre 40 000 et 60 000 euros et finalement adjugé 105 000 euros par Maître Dominique Le Coënt-de Beaulieu le 12 mars 2017 à Senlis. « Il faut noter que notre œuvre est non seulement reproduite au catalogue raisonné établi par Guy-Patrice et Michel Dauberville aux Editions Bernheim-Jeune en 2009, mais aussi au catalogue raisonné édité par Ambroise Vollard en 1918 qui répertoriait les tableaux conservés encore dans les années 1910 dans l’atelier de l’artiste », remarque l’experte.
« Même si Renoir est un grand nom, la toile de Marquet me charmait encore davantage. »

Albert Marquet (1875/1947), « Sidi Bou Saïd, vue de la maison du peintre ». Huile sur carton toilé, signée en bas à droite. 15 x 21 cm. Provenance : Ancienne collection M. Leroux. Adjugé 27 500 euros.
Une vue de Sidi Bou Saïd par Albert Marquet ajugée 27 500 euros
Lors de cette même vente, Maître Samuel Boscher présentait une toile intimiste d’Albert Marquet (1875-1947). Estimée entre 12 000 et 15 000 euros, elle s’est envolée jusqu’à 27 500 euros. « Même si Renoir est un grand nom, la toile de Marquet me charmait encore davantage, confie le commissaire-priseur. Elle provenait de la même collection particulière et figurait une vue de la maison du peintre à Sidi Bou Saïd, un village de Tunisie dans lequel il était installé avec sa femme originaire d’Alger. » Éternel voyageur, Marquet sillonne le pourtour méditerranéen avant de rencontrer Marcelle Martinet qu’il épouse en 1923. Leur foyer de Sidi Bou Saïd, aux murs blancs et boiseries bleues typiques de la région, lui inspire nombre de scènes d’intérieur et vues de bords de mer. « C’était un petit bijou, parfait en tout point, et traité par les aplats si chers au peintre », précise Agnès Sevestre-Barbé.
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