Un manuscrit historique de Pétain ressurgit aux enchères à Nice
Près de 20 ans après sa réapparition, le manuscrit La Guerre Mondiale rédigé par Philippe Pétain sera vendu aux enchères le 11 mars à Nice. Histoire d’une découverte exceptionnelle.
« Ce n’est pas une œuvre littéraire, mais un manuscrit rédigé comme un cours. Après tout, Philippe Pétain a été professeur à l’Ecole de guerre avant la Première Guerre mondiale », constate l’expert Xavier Aiolfi. Ce volume de 351 pages foliotées, rédigées et illustrées à la main de 77 croquis de batailles est une chronique de le Grande Guerre, écrite par Philippe Pétain au début des années 1920. Il est divisé en 47 chapitres, et se termine par la liste des traités de Paix. « Pétain décrit en tacticien, un peu comme dans un journal de campagne, les mouvements des armées, les offensives, les percées, le nombre de morts, et les raisons des défaites », évoque l’expert, qui souligne également les qualités de cartographe de l’auteur. Il ne s’agit pas non plus de mémoires, puisqu’il n’utilise par le « je » et se désigne dans ces pages comme « le général Pétain ».
Cet ouvrage s’inscrivait peut être dans le cadre d’une œuvre de plus grande ampleur, une histoire du soldat français dont Pétain avait le projet. Il devait notamment y travailler avec le Général de Gaulle, mais le projet n’aboutira qu’à une brouille entre les deux auteurs aux vues très différentes dans les années 1926-1927.
Le parcours rocambolesque d’un manuscrit historique de Philippe Pétain
Ecrit dans les années 1920, le le manuscrit passe aux mains d’une famille italienne dans les années 1945, sans que les raisons en soient précisément établies. Il s’agit peut être d’un don, ou d’un troc avec une personne venue faire des travaux de maçonnerie dans la propriété de Villeneuve-Loubet des époux Pétain. Il reste ensuite dans la même famille jusqu’en 1989. Et en 2006, la fille du maçon italien, qui vient d’hériter de son père, demande à Jean-Jacques Dumur, ancien militaire et passionné d’Histoire, de se charger de la vente du livre. Il lance alors des analyses graphologiques, consulte des experts, et une vente est organisée en 2014 chez Sotheby’s. Mais quelques jours avant l’événement, des doutes sur l’authenticité du manuscrit sont soulevés, et la vente est annulée. Jean-Jacques Dumur obtient finalement en 2023 que la justice établisse définitivement l’authenticité, permettant ainsi la vente du 11 mars prochain à Nice.
En ce qui concerne l’estimation, l’expert note que lors de la première mise en vente finalement avortée en 2014, elle était de 250 000 à 350 000 euros, ce qui lui parait très élevé. « C’est irréaliste au regard du marché d’aujourd’hui, nous avons préféré miser sur une fourchette entre 80 000 et 150 000 euros ». Et lorsque l’on évoque la fin de Philippe Pétain, condamné pour indignité nationale et déchu de toutes ses distinctions militaires en 1945 , il rappelle qu’il s’agit pour ce livre « du Pétain des années 1920, pas dans les mêmes fonctions, pas dans le même rôle. Et cela ne retire rien à la valeur historique de ce document ».
