Le 24 octobre 2024 | Mis à jour le 24 octobre 2024

Une collection exceptionnelle d’armes anciennes dispersée aux enchères à Louviers

par Diane Zorzi

Annemarie et Gérard Tapie ont, l’espace de cinq décennies, rassemblé une collection exceptionnelle de plus de 180 pièces contant l’histoire des arts militaires et cynégétiques en Europe de la fin du XVIe siècle au début du XIXe siècle. Armes blanches, de jet ou à feu aux provenances prestigieuses et signées des plus grands armuriers se succèderont sous le marteau de Jean-Emmanuel Prunier le 27 octobre à Louviers à l’occasion d’une vente aux enchères qui devrait faire date dans le monde de la collection.

 

Elle est passionnée d’histoire, lui épris des mécanismes innovants. Mais c’est en harmonie qu’Annemarie et Gérard Tapie ont composé, pendant plus de cinquante ans, leur collection d’armes anciennes. « Ils n’ont pas eu la même approche, mais se complétaient parfaitement et repéraient toujours le même objet », constate Gaëtan Brunel qui s’est chargé de l’expertise des quelques 184 lots de leur collection, leurs « compagnons de vie » mis à l’encan le 27 octobre à Louviers. Au catalogue de la vente, des pièces aux provenances prestigieuses côtoient ainsi des armes qui doivent davantage leur attrait à la rareté de leur système de mise à feu. « On trouve par exemple une paire de pistolets qui aurait été donnée par le Marquis de Lafayette à l’un de ses compagnons d’arme lors de la guerre d’indépendance américaine et, plus loin, les premiers systèmes de mise à feu. C’est une collection homogène d’une grande qualité, avec des pièces qui ont été bien entretenues et qui n’ont subi aucune restauration », résume l’expert.

 

Les Tapie, 50 ans d’une passion partagée pour l’armurerie ancienne

Leur collection, les Tapie l’ont enrichie au gré de rencontres et de voyages. « Chez des amis, un bouquet d’armes blanches dans un gros étui d’obus, une paire de pistolets sur une commode et c’est le déclic pour partir en campagne pour 50 ans de passion partagée à la quête du Graal », racontent-ils au sein de la préface du catalogue de vente.

Leur quête les a notamment conduits à rassembler un grand nombre de rouets français, très rares sur le marché. « Clément Bosson, un spécialiste suisse des armes anciennes, soulignait à juste titre que pour cent pistolets à rouets allemands, on ne trouve qu’un seul pistolet à rouet français, détaille l’expert. Les rouets allemands sont plus faciles à entretenir, car le ressort du rouet est vissé sur la platine. Pour les rouets français, il est intégré dans la crosse, le coup est plus facile à percuter mais l’arme est plus fragile. »

Au catalogue des rouets français, Gaëtan Brunel attire notre attention sur une très longue paire de pistolets de Duclos, l’arquebusier de Louis XIII. « C’est rarissime, l’œuvre connue de François Duclos se limite au fusil du musée de l’Armée et à une paire de pistolets à rouet conservée à New York. Et ici, nous présentons une paire ! »

 

 

Du rouet au système à percussion, l’histoire des armes à feu

Au XVIIe siècle, la platine à rouet fut progressivement remplacée par la platine à silex, réputée plus fiable que la platine à mèche et moins fragile et onéreuse que le rouet. Une invention illustrée au catalogue par une rare paire de pistolets signés « Giova Antonio Gavazolo », un modèle original et précoce daté autour de 1640. « Ces pistolets à silex ont 40 à 50 ans d’avance ! Giova Antonio Gavazolo était l’arquebusier officiel de la ville de Venise et il est à l’origine de cadeaux diplomatiques prestigieux, de Louis XIII au Shah de Perse. Lors de la commande des armes pour le roi Louis XIII, Gavazolo est cité par le Podestat de Brescia au Sénat, en 1638, comme « l’homme le plus expérimenté et le plus parfait », et aussi par Petrini, dans son manuscrit de 1642, comme le meilleur artisan de son temps et le maître le plus doué du ciselage en bas-relief », note l’expert.

De Boutet à Lepage, les plus grands armuriers se côtoient au sein de cette collection. « Nicolas-Noël Boutet était l’arquebusier de l’empereur Napoléon Ier, et son élève, Jean Lepage, a travaillé de manière concomitante pour les personnalités de la cour, du roi Louis XVI, à Napoléon et Louis XVIII. » Lepage est l’inventeur du système de boulette de fulminate qui remplaça le mécanisme à silex, ouvrant la voie aux armes à feu modernes. « Nous présentons à la vente une rare paire dotée de ce mécanisme phénoménale dont le brevet date de 1810. Elle a appartenu au roi de Naples, Joachim Murat », se réjouit Gaëtan Brunel.

Rareté oblige, aucune estimation n’est avancée pour les armes les plus prestigieuses de la collection. L’expert attend pour cette vente une clientèle internationale. « Le marché des armes de collection fabriquées avant 1900 (armes de catégorie D) n’est pas impacté par la crise et le contexte géopolitique. Il se porte très bien et les collectionneurs sont nombreux », précise-t-il. De son côté, le commissaire-priseur Jean-Emmanuel Prunier espère que cette vente aux enchères qui dresse un vaste panorama des arts militaires et cynégétiques en Europe, de la fin du XVIe siècle au début du XIXe, « marquera le monde des collectionneurs ».

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