
Michel Biot, la nature à l’épreuve de l’abstraction
Le 25 octobre à Lyon, la maison Artenchères dispersera une centaine de toiles et œuvres sur papier provenant de l’atelier de Michel Biot. Une vente hommage à ce peintre abstrait décédé en 2020 qui n’a eu de cesse de traduire en peinture le spectacle de la nature.
« A la fois lyrique et totalement vibrante, la peinture de Michel Biot nous fait ressentir physiquement la nature dans ce qu’elle a de plus abstrait. Chacune de ses toiles est une contemplation, une observation sensorielle d’un paysage tour à tour mouvementé ou apaisé », détaille Agnès Savart qui rendra hommage le 25 octobre prochain, à Lyon et en live sur Interencheres, à Michel Biot (1936-2020) à travers une vente d’atelier rassemblant une centaine de toiles et œuvres sur papier représentatives de la carrière de ce « peintre des éléments ». Pour préparer cette vacation, la commissaire-priseur s’est rendue dans l’atelier de Michel Biot à Boulogne-Billancourt, où elle a rencontré l’épouse du peintre, la romancière et poétesse Anne Tiddis. « Ensemble, ils choisissaient le titre de ses toiles, souvent emprunts de poésie. Et lorsqu’il peignait, sa femme écrivait à ses côtés dans une véritable symbiose artistique », confie-t-elle avec émotion, précisant quelques-uns des titres évocateurs des œuvres présentées à la vente, à l’instar de Nébuleuses dans le cygne II, La promenade des arbrisseaux, Le souffle du gouffre ou La fierté des éléments.
Le spectacle de la nature
Onzième enfant d’une fratrie de treize, installée dans le quartier lyonnais de la Guillotière, Michel Biot se démarque très tôt de ses frères et sœurs par ses talents artistiques. Sa mère, pianiste et mélomane, organise régulièrement des concerts dans leur domicile familial où il présente sa toute première exposition à l’âge de 11 ans. En parallèle de ses études aux Beaux-Arts de Lyon, Michel Biot multiplie les voyages, du Sahara au Mexique en passant par la Toscane, la Bretagne ou la Provence, qui nourrissent son travail et accentuent son intérêt pour la nature. « A dix-huit ans, il part volontairement dans le désert, pour s’offrir l’expérience salutaire de sa vie. Il en ressort profondément bouleversé », explique le consultant de la vente, Bernard Gouttenoire. « Le monde tellurique qui surgissait constamment autour de moi me subjuguait », confie Michel Biot à l’issue d’un voyage en Kabylie. Michel Biot n’aura dès lors plus qu’un seul objectif, traduire la vigueur des éléments et fixer sur la toile le spectacle de la nature – « Ne m’intéressait plus que le végétal, l’humide, le fertile, le spongieux, le germinal… »
Un artiste chorégraphe
Lors de ses voyages, Michel Biot ne se promenait jamais sans un carnet de croquis. Observateur attentif, il couche sur le papier des notes pour mémoriser une couleur, un éclat de lumière ou une matière. De retour à l’atelier, le peintre troque le crayon pour des brosses, truelles et pinceaux et se livre à un véritable rituel, nouant un foulard autour de sa tête, avant de monter sur le « ring » de son espace de travail. Pour lui, peindre équivaut à « livrer un combat » avec la matière picturale. Il joue alors sur la profondeur des couches et des sous-couches et complète son tableau en y incorporant des matériaux organiques. Dans la préface de la monographie dédiée à Michel Biot, peintre des éléments, la critique d’art Lydia Harambourg définit sa technique comme une « immersion quasi physique, proche en cela du peintre chinois méditant devant la nature dont il assimile les données visuelles ainsi que l’essence qu’il transposera plus tard. »
Une reconnaissance institutionnelle
L’œuvre contemplative de Michel Biot est célébrée par maints critiques d’art, historiens, collectionneurs et galeristes. Fort de ce soutien, l’artiste expose à la FIAC dès 1979 et reçoit de nombreuses commandes publiques. En soixante ans de carrière, il réalise plus de 6 000 œuvres qui agrémentent aujourd’hui les musées nationaux, du Musée d’Art moderne de la ville de Paris au Musée de Dijon, et étrangers, à l’instar du Palais de l’Europe à Bruxelles. « Il métamorphose sa pâte en lumière, en atmosphère… l’air circule… reçoit une vibration, une vie… », saluait l’ancien directeur du Musée d’Art moderne de Paris. La vente d’atelier du 25 octobre retracera l’ensemble de sa carrière, abordant les thématiques qui lui étaient chères telles que la géologie, la végétation, la mer, le ciel, les nuages ou les planètes. Les œuvres sont estimées de quelques dizaines d’euros à 2 000 euros et seront présentées, avant la vente, lors d’une exposition ouverte au public, du 21 au 24 octobre au sein des locaux de la Galerie Artenchères.