
Des nus inédits de Sanyu aux enchères à Louviers
Le 31 octobre à Louviers, Jean Emmanuel Prunier présentera aux enchères huit encres inédites de Sanyu issues de la collection Habart. A travers ces nus minimalistes et délicats, l’artiste célèbre la sensualité féminine et livre une œuvre moderne, dans la lignée d’Henri Matisse.
Nul hasard si Sanyu (1895-1966) est surnommé le « Matisse chinois », ses encres et aquarelles sur papier ressemblent à bien des égards à celles du maître moderne, ainsi qu’en témoignent les huit dessins inédits présentés aux enchères à Louviers. Au sein de nus épurés, l’artiste adopte une même ligne serpentine, élaguant tout détail superflu, pour ne retenir qu’un contour, une silhouette propre à suggérer les courbes sensuelles de ses figures féminines. Si son œuvre graphique s’inscrit dans la tradition de la calligraphie chinoise, jouant de pleins et déliés, elle est pétrie des nouvelles recherches qui émergent alors dans les cercles de l’avant-garde parisienne. Sur les pas de Matisse, Sanyu rompt avec l’exactitude descriptive, livrant une œuvre moderne, aux confins de l’abstraction.
Sanyu, le Matisse chinois
Né dans une famille prospère de la province de Schiuan, au sud-ouest de la Chine, Sanyu découvre dès son plus jeune âge les rudiments de la peinture au contact de de son père, peintre animalier renommé, et se forme à la calligraphie auprès du maître Zhao Xi. Après une année d’apprentissage à Tokyo en 1911, il bénéficie du soutien de sa famille pour suivre des études artistiques à Paris. « Il s’inscrit à l’académie de la Grande Chaumière qui est connue pour encourager l’art indépendant et la liberté d’esprit », détaille Jean Emmanuel Prunier. « Il y suit notamment des cours de dessin sur modèle vivant et fait du nu son thème de prédilection, nouant un dialogue intime avec ses modèles. » Il fréquente les mêmes quartiers que Matisse, Picasso, Modigliani ou encore Brancusi, partageant leurs cafés, leurs muses et, bientôt, leur esthétique avant-gardiste.

[A gauche] Sanyu. Femme nue assise. Encre sur papier, signé en haut à droite. Dim. 49×29 cm. collection Habart. [A droite] Sanyu. Femme nue debout bras croisés. Encre sur papier Ingres. Dim. 48,3×31,5. Collection Habart.
Huit dessins estimés entre 25 000 et 30 000 euros
Aujourd’hui, Sanyu compte parmi les artistes asiatiques les plus prisés des collectionneurs. Aux enchères, ses nus atteignent des prix records, à l’instar d’un dessin mêlant l’encre, l’aquarelle et l’huile, qui s’est envolé à 2,4 millions d’euros en 2018 à Pékin, établissant un record mondial pour une œuvre graphique de l’artiste. Plus récemment, le 9 octobre à Hong Kong, un nu vu de dos a quant à lui pulvérisé son estimation, fixée autour de 20 000 euros, pour trouver preneur à 104 968 euros.
Sanyu n’a pourtant pas rencontré le même succès de son vivant. Le décès de son frère et la fin de sa collaboration avec le collectionneur et marchand Henri-Pierre Roché plonge l’artiste dans un profond isolement social et financier. Il meurt en 1966 sans héritier, ni mécène, léguant ainsi l’intégralité de son œuvre à l’Etat français qui disperse l’ensemble de son travail à l’occasion d’une vente aux enchères à Paris. A cette occasion, Michel Habart, ingénieur agronome et collectionneur d’art, achète un grand nombre de ses dessins, fasciné par le tracé délicat de l’artiste. Deux ans plus tard, il fait don de huit encres et aquarelles à Albert Habart, son cousin, lui aussi passionné d’art moderne. Inédites sur le marché, elles seront dispersées à l’occasion de la vente « Intemporel », organisée par Jean Emmanuel Prunier le 31 octobre à Louviers et en live sur Interencheres. Les enchérisseurs devront compter sur une estimation comprise entre 25 000 et 30 000 euros pour s’offrir l’un de ces précieux témoignages de l’art sensuel de Sanyu.
Enchérir | Suivez la vente des dessins de Sanyu le 31 octobre en live sur interencheres.com

[A gauche] Sanyu. Femme nue debout de profil. Encre sur papier, signé en haut à droite. Dim. 45×27,5 cm. collection Habart. [A droite] Sanyu. Femme nue à la barrette. Encre sur papier Ingres. Dim. 47×31. Collection Habart.