En marge de Paris Photo : Bill Brandt aux enchères à Lyon
A quelques jours de l’événement Paris Photo, dix-sept tirages du photographe Bill Brandt (1904-1983) seront mis aux enchères par la maison de ventes Milliarède samedi 4 novembre 2017 à Lyon. Estimés de 1 000 à 8 000 euros, ils retracent l’évolution de cet artiste britannique dont les compositions énigmatiques et contrastées ont fait la renommée.
De Paris Photo aux enchères : Bill Brandt au cœur de l’actualité
Du 9 au 12 novembre 2017, le Grand Palais à Paris accueillera l’un des événements les plus importants de l’année : Paris Photo. Pour sa 21e édition, la foire de renommée internationale présentera 190 exposants provenant de 30 pays. Parmi eux, la galerie James Hyman de Londres dévoilera quelques tirages de Bill Brandt. Mais il ne sera pas nécessaire d’attendre jusque-là pour se délecter des nus et portraits noirs et blancs du célèbre photographe.
Dix-sept de ses œuvres seront dispersées aux enchères samedi 4 novembre 2017 à l’Hôtel des ventes de Lyon. « Ces photos ont été achetées par un passionné il y a une trentaine d’années à la Marlborough Gallery de Londres, précise Raphael Chicheportiche, spécialisé en photographie XIX-XXe et consultant expert associé avec André Berthet. Ce sont des œuvres réalisées de 1930 à 1963, tirées de la main de Bill Brandt autour de 1980. Le collectionneur connaissait l’artiste. Il s’intéressait à la photo de manière générale et avait acquis pas mal de clichés, dont les plus iconiques, les nus. »
Des témoignages historiques de la Grande Dépression
Des paysages urbains aux nus esthétisants, la vente retrace le parcours de ce photographe né en Allemagne d’un père anglais, et qui passa la plus grande partie de sa vie en Angleterre. Au cours des années 1930, en pleine Grande Dépression, Bill Brandt parcourt le pays. De Londres au Yorkshire, il capture les paysages, les usines à charbon, les habitants et documente ainsi la vie rurale et urbaine. « Ses photographies de mineurs reflètent la misère et les difficultés que connaissent les britanniques à cette époque de crise économique exceptionnelle. Mais Bill Brandt s’intéresse aussi à la vie de personnes plus aisées à travers ses reportages de servantes. » Les pauvres d’un côté, les riches de l’autre. Il dépeint les inégalités qui s’installent dans une Angleterre d’entre-deux-guerres où la classe moyenne n’existe plus.
Mais derrière l’œil du reporter se cache aussi l’âme de l’artiste. Ainsi, ces véritables témoignages historiques sont bien souvent le résultat de mises en scène, de compositions dans lesquelles Bill Brandt n’hésite pas faire à poser ses modèles. Usant d’ombres et de jeux de lumière, il baigne ses scènes de genre et paysages d’une atmosphère poétique et mystérieuse.
Des paysages imaginaires
Au lendemain de la guerre, Bill Brandt délaisse le document et se laisse guider par la sensualité d’un dos, la beauté d’un visage, le pli d’un coude.
Avec son Kodak, les membres du corps sont sélectionnés et tronqués, pour devenir de purs éléments formels, une matière à travailler à la manière du sculpteur. Ils évoquent ainsi des paysages, comme ces genoux qui, installés sur des galets, dessinent des collines imaginaires.
Avec ces nus énigmatiques qu’il publie dans Perspective of Nudes en 1961, Bill Brandt renoue avec le travail mené à son arrivée à Paris en 1929. « Avant de s’établir en Angleterre, il s’est formé auprès du photographe surréaliste Man Ray pour lequel il travaillait comme assistant. » Son œuvre est ainsi empreinte de mystère, à l’image des paysages qu’il photographie tout en contrastes.
Des portraits psychologiques
Au même moment, il s’adonne à l’art du portrait. « Je crois qu’un bon portrait se doit d’exprimer quelque chose qui concerne le passé du sujet et donner à entrevoir quelque chose de son avenir », confie alors l’artiste. En 1963, il photographie son ami Francis Bacon au cours d’une promenade londonienne. « Ce portrait reflète bien la personnalité torturée du personnage. Bill Brandt ne se contente pas d’en décrire l’apparence physique, il s’empare de la psychologie de ses modèles par des prises de vue théâtrales. » A mesure que les années passent, le photographe accentue les contrastes, atteint d’une sorte de diabète qui altère sa vision.
Des œuvres cotées sur le marché
Son œuvre si personnelle, opposant les noirs et les blancs les plus francs, figure aujourd’hui dans les collections des plus grands musées, du MoMA à New York à la Bibliothèque nationale de France à Paris, en passant par le Victoria and Albert Museum à Londres. « Bill Brandt a également une cote sur le marché. On le retrouve dans les plus grandes maisons de vente du monde et ses nus attirent particulièrement les acheteurs. » Lors de cette vente, il faudra ainsi compter entre 2 500 et 8 000 euros pour un nu, au contraire des paysages, portraits et scènes de genre estimés entre 1 000 et 3 000 euros.
« Certains des nus les plus iconiques peuvent parfois atteindre jusqu’à 60 000 euros, précise le consultant expert. Mais il s’agit de tirages d’époque. Samedi 4 novembre, ce sont des tirages postérieurs qui seront mis aux enchères. Aussi, le nu le plus cher est estimé entre 7 000 et 8 000 euros. Mais la vente peut réserver de belles surprises. Les œuvres de Bill Brandt ne sont pas nombreuses et les collectionneurs pourraient se battre sur un tirage, même s’il s’agit d’un cliché plus tardif. » Pour le savoir, rendez-vous samedi 4 novembre 2017 à l’Hôtel des ventes de Lyon. Et en attendant :