Henri Martin : une étude pour les amoureux du Capitole toulousain
Le 9 octobre dernier à Troyes, Léonard Pomez présentait aux enchères une étude préparatoire d’Henri Martin peinte vers 1906. Acquise par un collectionneur français pour plus de 34 000 euros, elle révélait les prémices de l’ensemble décoratif que le peintre néo-impressionniste réalisa pour le Capitole de Toulouse.
Au Capitole, à Toulouse, une salle décorée de dix toiles majestueuses célèbre un enfant du pays dont la notoriété devait, à l’aube du XXe siècle, rayonner bien au-delà des frontières du Languedoc. Né à quelques encablures de là, au 127 Grande-Rue-Saint-Michel, Henri Martin (1860-1943) reçoit en 1906 la commande d’une fresque décorative pour parer les murs de la salle des Pas Perdus de ce monument emblématique de la ville rose. Le peintre néo-impressionniste imagine pour le mur sud un premier cycle autour des quatre saisons auquel répond un second ensemble, sur le mur nord, figurant Les bords de la Garonne avec Les amoureux, Les rêveurs et Le poète. « Henri Martin a reçu de nombreuses commandes publiques et privées, à l’instar de fresques pour la mairie du cinquième arrondissement à Paris, le Conseil d’Etat, la préfecture du lot à Cahors ou encore l’Hôtel de ville de Paris. Celle pour le Capitole est l’une des plus importantes », explique Agnès Sevestre-Barbé, experte en art des XIXe et XXe siècles.
Une étude proche du tableau définitif
Avant de livrer ces ensembles décoratifs, Henri Martin travaille minutieusement ses sujets et multiplie les études préparatoires. L’une d’elles était dévoilée aux enchères par Léonard Pomez le 9 octobre à Troyes. Elle donnait à voir le couple d’amants qui compose la partie gauche du triptyque nord de la salle Henri Martin du Capitole. « C’est une étude relativement poussée, proche du motif définitif », poursuit l’experte. Le peintre a d’ores et déjà fixé la position des personnages, les deux amants avançant main dans la main, sur les bords de la Garonne. Seuls quelques détails diffèrent : la femme a échangé sa jupe et son tablier bleu au profit d’une robe rose élégante, tandis que l’homme a perdu son gilet. « Les jeux de lumière sont déjà là, avec ce fond jaune qui forme une auréole autour de la tête du personnage féminin. La touche, quant à elle, y est peut-être plus lâche que dans le tableau définitif où elle semble davantage serrée. » Après une formation académique auprès de Jules Garipuy, à l’Ecole des beaux-arts de Toulouse, suivie d’un apprentissage à Paris dans l’atelier de Jean-Paul Laurens, Henri Martin rejoint en 1885 l’Italie pour se frotter aux tableaux des peintres primitifs. Là, l’artiste se libère progressivement du modèle académique pour livrer des toiles empreintes d’onirisme et traitées avec les couleurs vives et la touche divisée qui caractériseront désormais son style, à mi-chemin entre le pointillisme et le fauvisme. « Il adoptera toute sa vie cette touche en pointillé qui aura néanmoins tendance à se resserrer à la fin de sa vie, alors qu’il est installé à Labastide-du-Vert, dans le Lot. »
Une toile néo-impressionniste adjugée plus de 34 000 euros
Authentifiée par Marie-Anne Destrebecq, auteure du Catalogue raisonné d’Henri Martin, notre étude était vendue dans le cadre d’une succession, avec une estimation comprise entre 15 000 et 20 000 euros. Elle a finalement été acquise pour 34 720 euros par un collectionneur français, face à un enchérisseur suisse. Le record pour une toile d’Henri Martin s’élève quant à lui à 1,3 million d’euros, remporté en 2012 à New York avec La joie de vivre de 1905. Plus récemment, une étude pour La Moisson de 1918 a trouvé preneur à 40 000 euros lors d’une vente organisée en mars dernier à Paris. Le record pour une étude préparatoire a été établi en 2012 à Londres avec une toile de 1903 adjugée 128 298 euros. Cette œuvre de près d’1,30 mètre de largeur dévoilait les prémices d’un autre tableau de la salle Henri Martin du Capitole : Les faucheurs ou L’été, issu du cycle des quatre saisons.
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