
Un portrait de Raden Saleh acquis pour 124 000 € par le Musée Pasifika de Bali
Un an après le record mondial enregistré pour un tableau de 1855, Maître Jack-Philippe Ruellan présentait à la vente le 26 janvier à Vannes une nouvelle œuvre du peintre indonésien Raden Saleh. Datée de 1841 et dévoilant un portrait présumé du romancier Alexandre Pouchkine, elle a été acquise pour 124 000 euros par le Musée Pasifika de Bali.
Le 27 janvier 2018 à Vannes, La Chasse au taureau sauvage de Raden Saleh (1811-1880) créait la surprise sous le marteau de Maître Jack-Philippe Ruellan. Adjugée 7,2 millions d’euros, elle enregistrait un record mondial pour l’artiste surnommé le « Delacroix indonésien ». « C’était un triple record : pour l’artiste, pour un tableau indonésien vendu aux enchères et pour les ventes publiques en Bretagne », s’enthousiasmait le commissaire-priseur breton. Un an après, il présentait à la vente le 26 janvier à Vannes une nouvelle toile du peintre indonésien. « Elle provenait de la collection d’un couple résidant en Grèce, détaille Delphine Kahl, collaboratrice de la maison de ventes Ruellan. Ils avaient ce tableau depuis longtemps dans leur famille et ils ont sollicité Maître Ruellan après avoir vu l’enchère exceptionnelle enregistrée en 2018. » Estimée autour de 60 000 euros, la toile a finalement été acquise pour 124 000 euros par le Musée Pasifika de Bali. « L’institution avait déjà enchéri en 2018 jusqu’à 4 millions d’euros pour La Chasse au taureau sauvage.«
Une toile de style romantique datée de 1841
La toile, datée de 1841, dévoile au gré de coups de pinceau vigoureux un portrait expressif au style résolument romantique. « La ligne est souple, le modelé doux et fondu, la touche enlevée, décrit Maître Jack-Philippe Ruellan. Raden Saleh ose même un fort empâtement sur le front et sur le col blanc qui se détachent fortement de la toile. » Peintre d’origine aristocratique, Raden Saleh fut formé en Europe, à l’époque où l’Indonésie comptait parmi les colonies néerlandaises d’Asie du Sud-Est, contrôlées par les Pays-Bas de 1800 à 1945. Il fut l’élève du peintre de genre et portraitiste Cornelis Kruseman à La Haye, adoptant avec lui un néoclassicisme académique, avant de se tourner vers un style plus romantique à l’occasion de son séjour à Dresde entre 1939 et 1845, période durant laquelle il peint ce tableau.

Raden Syarif Bastaman Saleh (1811 ou 1814 – 1880), « Portrait présumé d’Alexandre Pouchkine », sur sa toile et son châssis d’origine, signée et datée à droite « Raden Saleh 1841 », 59 x 52,5 cm. Adjugé 124 00 euros (frais compris).
Le portrait présumé d’Alexandre Pouchkine
Proche des portraits de Delacroix ou Ary Scheffer, la toile révèle une grande liberté d’exécution. « La représentation d’un artiste, d’un peintre ou d’un poète se prête plus facilement à une liberté picturale que celle d’un commanditaire bourgeois. Aussi, nous pourrions y reconnaître le visage du célèbre écrivain et poète russe Alexandre Sergueïevitch Pouchkine (1799-1837). En effet, si nous comparons notre tableau aux portraits contemporains de Vassili Tropinine, d’Oreste Kiprensky ou de Pyotr Fyodorvich Sokolov, nous pouvons déceler des caractéristiques physiques communes : les yeux d’un bleu presque vert, les cheveux bouclés et les favoris, très à la mode à cette époque. » Raden Saleh, qui n’a jamais rencontré l’auteur de la célèbre Dame de Pique, se serait alors probablement inspiré des peintures et gravures qui circulaient à l’époque pour peindre ce portrait posthume présumé.
Un tableau estimé entre 60 000 et 80 000 euros
Pour l’occasion, Maître Jack-Philippe Ruellan est retourné à Singapour présenter la toile aux collectionneurs et conservateurs de musées, nombreux en Asie à s’intéresser à l’artiste. La Chasse au taureau sauvage avait en effet été acquise par un groupe de collectionneurs indonésiens, soucieux de faire revenir l’œuvre dans son pays d’origine. Ce portrait au sujet plus européen rejoindra finalement les collections du Musée Pasifika de Bali.
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