Le 25 juillet 2022 | Mis à jour le 2 août 2022

Une esquisse inédite du baron Gros découverte dans un manoir breton

par Diane Zorzi

Antoine-Jean Gros offrant à Louis Nicolas Lemasle, de 17 ans son cadet, un dessin préparatoire pour lui faciliter l’exécution d’un tableau commandé par le roi Charles X : c’est l’histoire d’une transmission féconde que raconte la vente aux enchères d’une esquisse inédite découverte dans un manoir breton par Dupont & Associés.

 

[Mise à jour du 2 août 2022] Le dessin préparatoire du baron Gros a survolé son estimation, trouvant preneur à 5 500 euros (frais inclus) lors de la vente de prestige de Dupont & Associés.

 

Lors de son exil à Bruxelles, Jacques-Louis David exhorte Antoine-Jean Gros (1771-1835) à reprendre les rênes de son « école », soucieux que son enseignement, en marge de l’Académie, perdure auprès de la jeune génération. « Défendez ces chers jeunes gens, quand ils seront en état de concourir au grand prix de Rome, de l’injustice de leurs juges, qui n’ont cessé de poursuivre leur maître. Préservez-les ; soyez leur guide », écrit-il à son émule le 18 juillet 1816. Ce vœu, Antoine-Jean Gros semble l’avoir satisfait, ainsi que le révèle une esquisse découverte récemment dans un manoir du XVIIe siècle, près de Morlaix, dans le Finistère. Avec ce dessin, l’artiste prêtait en effet ses talents à Louis Nicolas Lemasle (1788-1876), de 17 ans son cadet, afin de l’aider à honorer une commande d’envergure : un tableau représentant Le roi Charles X visitant les peintures de Gros à la coupole du Panthéon, conservé aujourd’hui dans les collections du château de Versailles.

 

Antoine-Jean Gros, dit Le Baron Gros (1771-1835), « Le roi Charles X visitant les peintures de Gros à la coupole du Panthéon, 3 novembre 1824 ». Pierre noire et encre brune, 25 x 35 cm. Estimée entre 1 800 et 2 000 euros.

 

Charles X visitant les peintures du baron Gros au Panthéon

Si, au sein des ateliers, il était courant qu’un tableau soit exécuté par un élève avant d’être retouché et signé par le maître, la transmission féconde que révèle notre esquisse paraît pour le moins originale. « C’est une pratique rare, mais il existe d’autres témoignages, souligne l’expert Alexis Bordes. Il arrivait en effet parfois que de jeunes artistes, confrontés à un problème d’inspiration, sollicitent l’aide d’un grand maître ». Lorsqu’il reçoit cette commande en 1825, Louis Nicolas Lemasle n’est pourtant plus le jeune élève de David. L’artiste revient tout juste d’un séjour de 13 ans en Italie où il a pu parfaire sa formation et expose depuis 1817 au Salon. « Il a sans doute eu quelques difficultés à composer ce tableau. Il a donc fait appel à l’un des artistes les plus importants de l’époque, le baron Gros », poursuit Alexis Bordes. Un choix fort à propos puisque le sujet lui-même rendait hommage au peintre, connu pour ses portraits et scènes de bataille à la gloire de Napoléon, et à l’œuvre qui le gratifia du titre de baron. Acquis pour 3 000 francs en 1825 par le château de Rambouillet, le tableau définitif de Lemasle commémorait en effet une visite du roi Charles X et du duc d’Angoulême le 3 novembre 1824 lors de laquelle fut dévoilé le décor d’Antoine-Jean Gros pour la coupole du Panthéon.

 

Louis Nicolas Lemasle (1788-1876), « Le Roi Charles X visite les peintures de Gros à la coupole de l’église Sainte-Geneviève, le 24 novembre 1824 ». Huile sur toile, 218,7 x 184,5 cm. Conservée au château de Versailles, en dépôt au Musée du Château de Compiègne.

 

Un dessin de l’ancienne collection du duc de Trévise

Notre esquisse exécutée à la pierre noire a été découverte dans une propriété bretonne avec un ensemble de dessins de Géricault et Gros, provenant de l’ancienne collection du duc de Trévise (1883-1946).  Sous la composition, une inscription manuscrite a permis d’en identifier l’auteur : « Cette croquade a été faite par le Célèbre Gros, pour me faciliter l’exécution du tableau que m’avait commandé Le Roi Charles X ». Si l’estimation est comprise entre 1 800 et 2 000 euros, ce dessin inédit, témoin d’un échange rare entre un maître accompli et un peintre à l’aube de sa carrière, devrait attirer de nombreux collectionneurs lors de la vente aux enchères organisée par Dupont & Associés le 1er août à Saint-Martin-des-Champs qui compte également une belle composition néoclassique représentant Pauline pleurant le départ de son époux Polyeucte, un sujet tiré de la tragédie de Pierre Corneille, Polyeucte martyr (6 000 – 8 000 euros).

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