Estimé 90 000 € - 110 000 €
Par Maître Brice Pescheteau-Badin à Paris le 06/11/2024 : MACKENNEY (Thomas Lorraine) et James HALL. History of the Indian Tribes of North America, with biographical sketches and anecdotes of the principal chiefs. Philadelphia, published by Edward C. Biddle, puis F. W. Greenough, puis James T. Bowen, enfin Daniel Rice and James G. Clark, 1836-1844. 3 volumes grand in-folio, 4-206-(2, soit une de table et une blanche) + 237-(une blanche), avec un feuillet de table encarté après le feuillet de titre (soit 2 pp. dont la seconde blanche) + (4 dont une de titre, une de dépôt légal, une de table et la dernière blanche)-196-(2) pp., complet du rare papillon d'erratum après la p. 58 du volume II. Reliure de demi-maroquin noir orné, plats de percaline noire avec titre doré sur les plats supérieurs, tranches dorées ; dos et coins refaits en chagrin noir moderne avec façades des dos conservées ; quelques rousseurs, infime rognure sur une tranche du premier volume, quelques restaurations en marges extérieures, quelques perforations en marge intérieure du premier volume, mouillures angulaires aux premiers feuillets du vol. III (reliure de l'époque).
UNE VASTE HISTOIRE EDITORIALE : longue et complexe, elle s'étendit de 1829, où fut conçu le projet de cet ouvrage, jusqu'à l'année 1844, où s'acheva sa publication. History of the Indian tribes of North America a été publié en 20 livraisons par plusieurs éditeurs successifs, et connut plusieurs tirages, tous de même importance, la plupart des exemplaires mêlant d'ailleurs des planches de différents tirages.
UNE DES PREMIERES SOMMES SUR LES NATIONS INDIENNES, comprenant une histoire générale et de précieuses biographies, par un des meilleurs connaisseurs de ces peuples, le colonel Thomas L. MacKenney (1785-1859). Comme superintendant du Commerce indien (1816-1822) puis comme directeur des Affaires indiennes jusqu'en 1830, celui-ci fut chargé de négocier sur le terrain les traités avec les tribus, et d'accueillir les délégations indiennes à Washington. Il fonda en outre les Archives nationales des Indiens d'Amérique (premier musée de Washington), où il recueillit les témoignages de la culture amérindienne qu'il avait réunis et qu'il continuait à récolter, objets d'art et d'artisanat, études ethnographiques, et fit peindre spécialement, à grands frais, des portraits des personnalités indiennes lors de leurs passages à Washington (l'ensemble serait ensuite déposé au Smithsonian Institute). MacKenney acheva de rédiger son texte en 1831 mais, pour le réviser et superviser sa publication, il se fit successivement aider par plusieurs personnes : la première fut l'ancien président des États-Unis John Quincy Adams, et la dernière, celle qui fournit le plus gros travail à partir de 1836, fut l'avocat, journaliste et banquier James Hall.
UNE MAGNIFIQUE ILLUSTRATION DE 130 FF. DE PLANCHES LITHOGRAPHIEES HORS TEXTE. Elle comprend d'abord 120 ff. de planches en couleurs, soit 3 frontispices (scène de danse de guerre, scène de chasse au bison, scène de campement indien) et 117 portraits ; ensuite 10 ff. de planches en noir, soit un f. portant une composition de 2 cartes avec tableau, et 9 ff. (8 recto-verso) portant des reproductions de signatures de souscripteurs, classées par États. Au signatures lithographiées du présent exemplaire ont été ajoutées 2 signatures à l'encre pour la Pennsylvanie.
LE SEUL TEMOIGNAGE ICONOGRAPHIQUE SUR PLUSIEURS DES GRANDES FIGURES INDIENNES DE LA SECONDE MOITIE DU XVIIIe SIECLE ET DU DEBUT DU XIXe. Les superbes planches de l'ouvrage, accompagnant les biographies imprimées, ont été pour la plupart lithographiées d'après les tableaux commandités par MacKenney au peintre Charles Bird King. Celui-ci a travaillé d'après nature auprès des chefs indiens en visite à Washington, ou sur les aquarelles du peintre voyageur James Otto Lewis. Les originaux furent détruits en 1865 dans l'incendie du Smithsonian Institute, ce qui rend aujourd'hui d'autant plus précieux le présent ouvrage.
Provenance : l'éditeur Louis Antoine Godey (mentions ex-libris dorées en queues de dos et ex-libris manuscrits). Fils d'immigrants français, Louis Antoine Godey (1804-1878) publia le premier magasine féminin à succès des États-Unis, Godey's Lady's Book. Edgar Allan Poe y publia plusieurs textes. — Sa petite-fille Helen Godey Wilson, 1879-1937 (vignettes ex-libris illustrées gravées sur bois).
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Estimé 20 000 € - 25 000 €
Par Maître Brice Pescheteau-Badin à Paris le 06/11/2024 : MILBERT (Jacques-Gérard). Itinéraire pittoresque du fleuve Hudson et des parties latérales de l'Amérique du Nord. Paris, Henri Gaugain et Cie, 1828-1829. 2 volumes de texte grand in-4 (34,2 x 25,5 cm) ; (4 dont la dernière blanche)-xxxvi-146-(2 dont la seconde blanche) + (4 dont la dernière blanche)-257-(3 dont la première blanche) ; et un volume de planches grand in-folio. Le tout en reliure homogène : demi-veau cerise, dos à nerfs orné de motifs dorés et noirs avec deux entrenerfs teintés de noir pour les titres et tomaisons, tranches marbrées ; restauration à une coiffe, mors un peu frottés, déchirure marginale restaurée à un feuillet du premier volume, quelques rousseurs (reliure de l'époque).
ÉDITION ORIGINALE.
JOURNAL DE SON SEJOUR AUX ÉTATS-UNIS DE 1815 A 1823. Arrivé à New York en octobre 1815, Milbert trouva d'abord à se faire employer comme dessinateur technique pour des moteurs de bateaux à vapeur, puis gagna un temps sa vie comme professeur de dessin et peintre de portraits. En 1816, il participa durant six mois aux travaux du nivellement préparatoire pour l'établissement du canal Champlain (devant relier le lac Champlain au fleuve Hudson), au sein d'une équipe placée sous la direction d'un colonel du Génie français. En 1817, Milbert reçut commission de l'ambassadeur de France, Hyde de Neuville, de réunir une collection à destination du Muséum d'histoire naturelle : il s'y employa durant près de sept années, et parcourut l'État de New York, le Massachussetts, le New Hampshire, le Maine, Rhode Island, le Connecticut, le New Jersey, la Pennsylvanie, le Maryland, et fit une excursion en Virginie pour voir le fameux « pont naturel ». Il put ainsi recueillir et expédier plus de 7500 spécimens d'animaux, de végétaux et de minéraux, avec des fossiles, et aussi des dessins. C'est par Milbert que furent observés directement pour la première fois en France le bison, le vison ou l'aigle à tête blanche. Rentré à Paris en 1823, il s'attela au travail d'édition du présent Itinéraire pittoresque.
IMPORTANTE ILLUSTRATION LITHOGRAPHIEE SUR DESSINS D'APRES NATURE (principalement de Milbert), comprenant 54 lithographies hors texte par différents artistes dont Adam, Jacottet, Villeneuve, soit : un titre, une planche double de cartes dont une rehaussées de couleurs à la main, 54 vues tirées sur chine appliqué (chiffrées 1 à 53 avec la planche non chiffrée qui manque souvent) portant des légendes polyglottes (français, anglais, allemand, latin). Les dessins de Milbert, lithographiés sous sa direction, ont principalement été faits durant la remontée de l'Hudson qu'il a accomplie en bateau à vapeur en 1816 pour se rendre sur le site du futur canal Champlain, et concernent essentiellement l'État de New York. Si Milbert s'est surtout concentré sur les beautés des paysages naturels (sans omettre les chutes du Niagara), il s'est aussi attaché à représenter des villes (New York, Albany), et les témoins des premiers temps de l'industrialisation : une fonderie, une distillerie, une manufacture de coton, des dispositifs avec machines à vapeur, des moulins à scies... Il représente par ailleurs un haut lieu de la guerre d'Indépendance des États-Unis, le champ près de Saratoga où le général anglais John Burgoyne se rendit en 1777 au général américain Horatio Gates.
PEINTRE, NATURALISTE ET VOYAGEUR, JACQUES-GERARD MILBERT (1766-1840) fut d'abord professeur de dessin à l'École des Mines (1795). Aimant à voyager, il fut employé à une mission dans les Pyrénées pour relever les sites miniers, puis, en 1799, dans les Alpes pour étudier les possibilités d'améliorer le réseau routier entre la Suisse et l'Italie et la navigation sur le Rhône entre Genève et Lyon. En 1800, il fit partie de l'expédition Baudin vers les mers du Sud, mais laissé malade en 1801 à l'escale de l'Île-de-France (île Maurice), il y resta jusqu'en 1803, publiant après son retour un important Voyage pittoresque à l'Ile-de-France, au cap de Bonne-Espérance et à l'île de Ténériffe, illustré de planches gravées sur cuivre (1812). En 1815, il partit pour l'Amérique à titre personnel, puis y demeura chargé d'une mission officielle pour le Muséum d'histoire naturelle. Rentré en 1823, il publia le présent ouvrage.
RARE EXEMPLAIRE EN BELLE RELIURE HOMOGENE DE L'EPOQUE.
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Estimé 12 000 € - 15 000 €
Par Maître Brice Pescheteau-Badin à Paris le 06/11/2024 : FRANKLIN (Benjamin). Expériences et observations sur l'électricité faites à Philadelphie en Amérique. À Paris, chez Durand, 1756. 2 volumes petit in-8, (6 dont la deuxième blanche)-28-xc-(12)-245-(une blanche) + (2 dont la seconde blanche)-349-(1) pp., maroquin grenat, dos lisse cloisonné et fleuronné avec pièces de titre et de tomaison brunes, triple filet doré encadrant les plats avec fleurons d'angles et armoiries dorées au centre, coupes filetées, roulette intérieure dorée, tranches dorées sur marbrure ; reliures avec discrètes restaurations, accroc aux pièces du dos du premier tome, discret accroc et trou de ver au dos du tome II (reliure de l'époque).
PREMIERE EDITION COMPLETE, EN PARTIE ORIGINALE, DE LA TRADUCTION FRANÇAISE, établie par Thomas-François Dalibard. Benjamin Franklin écrivit sur la question de l'électricité une série de lettres au naturaliste Peter Collinson de la Royal Society de Londres, étagées de 1747 à 1753. Son correspondant les livra à la publication à Londres en plusieurs fois de 1751 à 1754. Communiquées à Buffon, celui-ci en suggéra la traduction, et le soin d'établir celle-ci fut confiée au physicien et naturaliste Thomas-François Dalibard, qui alla jusqu'à conduire lui-même les expériences exposées par Benjamin Franklin (c'est lui qui suggéra de remplacer le cerf-volant par une pièce métallique pour attirer la foudre). Il publia la traduction des huit premières lettres en 1752, assortie d'une « Histoire abrégée de l'électricité » inspirée en partie de celle dressée par Jean-Baptiste de Secondat (fils de Montesquieu) dans ses Observations de physique et d'histoire naturelle (1750), et donna encore en 1756 la présente édition augmentée des cinq dernières lettres de Benjamin Franklin.
2 planches dépliantes gravées sur cuivre hors texte.
« FRANKLIN'S MOST IMPORTANT SCIENTIFIC PUBLICATION » (Norman, vol. I, p. 299, pour une édition anglaise). Le philosophe américain y propose une nouvelle conception de l'électricité décrite comme un fluide présent dans tous les corps, qui ne disparaît pas mais passe d'un corps à l'autre, lesquels peuvent donc être en déficit (chargés négativement) ou en excédent (chargés positivement). Le supplément contient la relation de l'expérience du cerf-volant et la démonstration identifiant la foudre à un phénomène électrique.
EXEMPLAIRE AUX ARMES DU PRINCE DE CONTI, PERE DU DEDICATAIRE DE LA TRADUCTION (fer proche du n° 7 de la planche n° 2645 d'OHR). Louis-François de Bourbon, prince de Conti (1717-1776) fut un esprit libre et indiscipliné : envoyé jeune à l'armée, il se distingua en Allemagne et en Italie tant par ses qualités militaires que par son indocilité, et dut faire front contre l'hostilité de nombreux ennemis à la Cour dont madame de Pompadour. Retiré en 1757, il se consacra aux lettres, aux arts et à la musique : athée notoire, il vécut dans une société de libre penseurs, recueillit plusieurs fois Rousseau, et protégea à l'occasion Beaumarchais, Diderot et l'abbé Prévost. Il avait été marié tôt à l'une des filles du Régent, dont il eut un enfant, le comte de la Marche Louis-François-Joseph, à qui est dédiée la présente traduction.
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Estimé 15 000 € - 20 000 €
Par Maître Brice Pescheteau-Badin à Paris le 06/11/2024 : CANADA. — POTIER DE POMMEROY (René-Gédéon). Manuscrit autographe signé en plusieurs endroits, ILLUSTRE DE DEUX CARTES. XVIIIe siècle. Journal autobiographique, familial et généalogique concernant en partie le Canada. Vers 1761-vers 1816. Environ 130 pp. in-folio, sous portefeuille en vélin rigide de l'époque ; quelques vignettes ex-libris imprimées ; plusieurs feuillets détachés et volants, queques-uns effrangés.
RENE-GEDEON DE POMMEROY, VETERAN DES GUERRES COLONIALES CONTRE LES ANGLAIS EN AMERIQUE DU NORD, ET COLON ACADIEN. Fils et petit-fils de militaires français ayant servi en Nouvelle-France, né au fort Frontenac au Canada, René-Gédéon Potier de Pommeroy (1730-1822) participa lui-même, comme officier en Amérique du Nord, aux opérations de la guerre de succession d'Autriche ((les Anglais nomment « Guerre du roi George » les actions militaires menées en Amérique du Nord dans ce cadre), puis à celles de la guerre de Sept Ans. Pommeroy fut par exemple présent à l'attaque des fort Saratoga et Lydius dans l'actuel État de New York (1747), à l'expédition sur le lac Ontario contre les Agniers (Mohawks) alliés aux Anglais qui menaçaient Montréal (1748). Il servit ensuite en Acadie, précisément à l'Île-Royale puis à l'île Saint-Jean (actuelles île du Cap-Breton et île du Prince-Edward au Nouveau-Brunswick canadien), et fut blessé dans la tentative française pour faire lever le siège du fort Beauséjour (aujourd'hui fort Cumberland) sur l'isthme de Chignectou (1755). Il fit ensuite partie des hommes envoyés à l'assaut du fort George sur le lac du Saint-Sacrement, actuel lac George dans l'État de New York (1757), et dut alors traverser seul les lignes ennemies pour porter en retour des courriers à l'île Saint-Jean. Emmené prisonnier en Angleterre aux termes de la capitulation de cette île (1758), il fut renvoyé au Canada avec les secours commandés par le capitaine d'Angeac (1760) : l'escadre qui transportait cette troupe remporta quelques succès contre les Anglais devant Gaspé, en baie du Saint-Laurent, puis fut défaite sur la rivière Ristigouche (1760). Refusant alors de prêter allégeance aux Anglais, Pommeroy perdit tous ses biens sur l'île Saint-Jean et dut quitter la Nouvelle-France. Il reçut ensuite le commandement d'un fort en Guyane et acheva sa carrière en 1768 comme capitaine, recevant la croix de Saint-Louis en 1771.
Aventures en Amérique du Nord
PRECIEUX VESTIGE DE L'HISTOIRE FRANÇAISE EN NOUVELLE-FRANCE ET NOUVELLE-ANGLETERRE. René-Gédéon Potier de Pommeroy fait notamment ici le récit des principales péripéties de sa vie militaire au Canada et en Nouvelle-Angleterre de 1742 à 1760, évoquant parfois les supplétifs iroquois, Mohawks côté anglais ou Iroquois « domiciliés » côté français ; il donne aussi copie de pièces militaires et civiles principalement relatives à sa carrière (dont des listes de soldats et d'Acadiens), mais aussi à ses possessions sur l'île Saint-Jean, et à sa famille.
« ... 2e juin 1747. A servie dans un détachement de 1500 hommes commandés par monsieur Rigauld de Vaudreuille gouverneur des Trois-Rivières , en qualités d'aide de camps par ordres du marquis de La Galissonnièr[e] ; suis trouvé dans un partie commendés par Mr de St‑Luc La Corne lieutenant, avons défaits un détachement de trouppes à portés de canon du fort de Sarastot de 300 honmes, avons fait 45 prisonnier[s]. Les sauvages firent plusieurs chevelures.
16e avril 1748. Servie par ordres du marquis de La Galissonnièr[e] sous les ordres du sr Fontenelle de Langie , cadet à l'éguillet[te], avec un parties sauvages, avons fait un prisonnier à Quindrouk Nouvelle Engleterre, après 45 jours de marches.
17e juillet 1748. Servie sous les ordres de Mr de Baubassin , sou[s]‑lieutenant par ordre de M, le marquis de La Galissonnière, avons été à Casquécouk après un mois de marche dans les montagnes, avons fait coup sans pouvoir faire de prisonnier malgré l'acharnemens des sauvages étant sous le canon du fort, avons eu sinq sauvages blessé[s], un de tué, avons mis hors de combats 15 honmes.
21 aoust 1748. Servie sous les ordres du ch[evali]er de La Corne, par ordre de Mr de Beaucour , gouverneur de Montréal, avec un partie de 200 hommes, allant au-devant des Anniés dans le lac Ontarios qui venoi[en]t pour faire coup sur l'isle de Montréal, nous fîmes échouer leurs entreprises pour lors.
1er mars 1749. Fait officiers, et passé à l'Isle-Royal[e] .
5 avril 1750. Détaché à la poursuitte de 3 soldats déserteur[s].
11 février 1757. Servies par ordre du marquis de Vaudreuille dans un parties de 1500 hommes commandés par Mr Rigaud de Vaudreuille , pour aller brûler tous les magazins et préparatif[s] qui se faisoi[en]t au fort George au lac S[ain]t-Sacrement .
2 may 1757. Mr le marquis de Vaudreuille me fit partire et me chargea des paquets de la Cour pour faire passer à l'Isle‑Royal[e] à Mr de Drucourt pour les faires passer en Frances ; je m'acquittés de cette mission à la barbe de l'ennemis qui bloquet de toute part ; après un moy e[t] demie d'un voyage des plus difficile[s], tantôt en bâtiment, tantôt en esquif, d'autrefoy en canot sauvages et une partie dans les bois avec beaucoup de fatigues.
3 may 1760. Servie sous les ordre[s] de Mr d'Angeac par ordre du roy pour passer en Canada y porter des secours avec 400 hommes de trouppes ; n'avons pu y parvenire, l'ennemis étant entré dans le fleuve S[ain]t-Laurent avant nous, avons fait sept prises devant Gaspé, et de là entré[s] dans la baye des Chaleurs selon nos ordres pour faire parvenire les paquets aux général. L'ennemis est venus nous y bloquer, le 3 juin, par trois vaisseaux de ligne [de] 74 [canons] et deux frégattes de 30 [canons]. Le 2 juillet je repouss[ai] 17 chaloupe[s] armée[s] qui tenterrent une dessente. J'essui[ai] leur feu sur le rivage de pierrier et de mousquetterie, j'avais 150 hom[mes], j'eu 2 hom[mes] blessé[s]. Jusqu'au 8 juillet qu'il nous livrèr[ent] combats et nous contraignirent de brûler notre frégatte, Le Machau[lt], monté de 22 pièces de canon manquans de poudre et n'ayant qu'onze pièces qui pouvoient battre étant embossé. Nos trouppes s'y sont distingué[es] par leurs zèle, et les fatigues qu'ils y ont enduré pandant un moy ; avons fait un camps à terre, l'ennemis s'est retiré. Nous nous sommes randu[s] suivant la capitulation du Canada, y étant compris et dans des bois san[s] secours ny ressource que de s'y voire périr de faim... » (pp. 38-40). Le texte a été achevé à Rochefort le 20 juillet 1761. Pommeroy rapporte ensuite à nouveau tout ou partie de ces faits en deux autres endroits du volume (pp. 106-109, 130), et sur un feuillet volant indépendant.
IL DRESSE AUSSI LA LISTE NOMINATIVE DES HOMMES COMPOSANT LA COMPAGNIE QU'IL COMMANDAIT A L'EXPEDITION DU FORT SAINT-GEORGES (p. 117) : 4 autres officiers, 17 soldats, 32 personnes qu'il appelle « habitants » ou « Canadiens ». Il fait ensuite le total détaillé par fonctions des membres de la troupe expéditionnaire à laquelle il appartenait, et qui comprenait plus de 1500 hommes dont « 340 sauvages ». Pour les soldats, il donne leurs noms complets et leur surnoms : « Brindamour », « Francoeur », « Bras-de-Fer », « L'Aubépine, « La Jeunesse », « Sanchagrin », « Argencourt », « Lafleur », « Sansoucy », « Beausoleil », etc. Pour certaines personnes, il précise en note des objets, peut-être apportés personnellement par celles-ci : des barils de poudre, un collier, un sac, etc. L'un des habitants est gratifié de la mention « mauvais sujet ».
Le volume autographe relié renferme de nombreux autres passages concernant le Canada et la Nouvelle-Angleterre, copies d'actes et de courriers, nominations, ordres de missions, etc., principalement aux pp. 29, 30, 55, 60-68, 87-89, 96-101, 106-110, 112-116, 125, 127-128, 130-131, 135, 137, 155-157, 160.
Rarissime carte de Port-La-Joye
sur l'île Saint-Jean (situation vers 1758)
— Carte de la principale localité portuaire de l'actuelle Île du Prince-Edward (encre et plume, 33 x 41 cm, notes généalogiques au verso, mouillures marginales). Avec précieuses légendes indiquant les noms des propriétaires des maisons ou terrains, dont les Potier de Pommeroy, ou indiquant des habitations d'Acadiens réfugiés. Aucune des cartes gravées ou dessinées anciennes connues de cette île ne permettent comme ici une lecture à une échelle locale.
Rarissime plan de la bataille de la Ristigouche (1760)
— Plan de l'embouchure de la rivière Ristigouche avec emplacement des vaisseaux, dont celui du Machault qui fut coulé (34 x 29 cm, long manque marginal, une tache). Pommeroy a aussi indiqué les lieux où des Acadiens et des Indiens Micmac (alliés des Français) des pourtours de la baie des Chaleurs en Gaspésie, fuyant devant les Anglais, se réfugièrent le long de la Ristigouche.
« Morceau de pavillon anglais » découpé au sabre
lors du siège du fort Beauséjour » (juin 1755)
Sur un feuillet avec légende autographe signée, d'une écriture d'homme âgé est aussi conservé un « morceau de pavillon anglais » découpé au sabre lors du siège du fort Beauséjour en juin 1755 (3 lambeaux de tissu, en tout 16 x 11 cm, appliqués sur un feuillet in-12 lui-même monté sur un feuillet in-folio appliqué sur un feuillet de carton souple moderne) « ... J'ai coupé ce morceau de pavillon anglais avec le même sabre qui m'a servi à mettre hors de combat cinq grenadiers anglais qui le gardaient, dont deux tués roides. Ledit pavillon était placé sur la redoute élevée par les Anglais qui assiégeaient le fort de Beauséjour, dans l'Accadie française, sous le commandement de M. Vergord Du Chambon . J'avais été envoyé au secours du fort avec sept officiers ; quatre furent tués et trois blessés - je le fus après la prise du fort par les Anglais. Dans le retraite, je conservai le drapeau pris sur l'ennemi qui me servit à envelopper ma blessure d'un éclat de bombe au genouil... »
Pommeroy consacre également plusieurs passages de son manuscrit au service qu'il effectua en Guyane, à Oyapok (pp. 40, 44, 46, 118-119, 126-128).
Les autres notes et copies de pièces concernant sa généalogie, au même titre que ses états de services, ont été compilés par Pommeroy dans le cadre d'une démarche destinée à prouver sa qualité de noble afin de conserver un emploi d'officier dans l'armée française au moment de son retour en France. Cette démarche fut couronnée de succès.
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Estimé 600 € - 800 €
Par Maître Brice Pescheteau-Badin à Paris le 06/11/2024 : . JEFFERSON (Thomas). Manuel du droit parlementaire, ou Précis des règles suivies dans le Parlement d'Angleterre et dans le Congrès des États-Unis, pour l'introduction, la discussion et la décision des affaires ; compilé à l'usage du Sénat des États-Unis. À Paris, chez H. Nicolle, 1814. Petit in-8, 233-(une blanche) pp., demi-maroquin vert émeraude, dos lisse ponctué de filets à froid et dorés ; quelques feuillets roussis (reliure vers 1840).
Deuxième édition de la traduction française, parue la même année que la première, par Louis-André Pichon qui y a ajouté des commentaires en notes de bas de page. Diplomate et conseiller d'État, le baron Pichon, père du célèbre bibliophile, fut notamment en poste aux États-Unis de 1791 à 1795 comme secrétaire de légation, en 1800 comme consul général de France puis de 1801 à 1804 comme ambassadeur de France.
« DE L'IMPORTANCE DES REGLES ». Comme vice-président des États-Unis, poste qu'il occupa de 1797 à 1801 avant d'être élu à son tour président, Thomas Jefferson avait pour obligation principale de présider le Sénat. Son prédécesseur John Adams ayant été critiqué pour sa pratique procédurale souvent arbitraire, il décida d'établir un manuel à son usage propre et à celui de ses successeurs. En partie fondé sur des textes anglais concernant la Chambre des communes, dont la Lex parlementaria de 1690, ce Manuel posant des principes généraux fut publié en 1801, et réédité en 1813 complété des règlements particuliers du Sénat (« rules and orders »). La qualité du travail fourni par Thomas Jefferson conduisit la Chambre des représentants à l'adopter également, et ce Manuel est encore aujourd'hui considéré comme le socle procédural commun au Sénat et à la Chambre des représentants, malgré les nombreuses variantes de détail qui ont pu être instaurées depuis lors entre les deux institutions.
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Estimé 10 000 € - 15 000 €
Par Maître Brice Pescheteau-Badin à Paris le 06/11/2024 : CONSTITUTIONS DES TREIZE ÉTATS-UNIS DE L'AMERIQUE. À Philadelphie ; et se trouve à Paris, chez Ph.-D. Pierres, Pissot, père & fils, 1783. Fort in-8, (4 dont la deuxième blanche)-540 pp., broché sous couverture d'attente avec étiquette manuscrite au dos ; volume placé sous emboîtage moderne de toile grise avec pièce de titre marron au dos ; couverture un peu usagée, mouillures marginales, emboîtage avec quelques salissures et mouillures.
PREMIERE EDITION DE LA TRADUCTION FRANÇAISE, IMPRIMEE POUR BENJAMIN FRANKLIN par Philippe-Denis Pierres. 600 exemplaires en furent tirés, soit 100 exemplaires au format in-4 sur vélin Johannot d'Annonay, et 500 exemplaires in-8 comme ici. L'originale en anglais avait été publiée à Philadelphie sur ordre du Congrès continental en 1781.
PREMIER RECUEIL COLLECTIF COMPLET DES CONSTITUTIONS PARTICULIERES DES TREIZE ÉTATS FONDATEURS DES ÉTATS-UNIS, avec leurs déclarations des droits - la Constitution fédérale ne serait signée qu'en 1787 -, comprenant également la Déclaration d'indépendance, les articles de la Confédération (en vigueur jusqu'en 1789 quand fut mise en application la Constitution fédérale de 1787), ainsi que les traités avec la France. Outre ces textes présents dans l'édition américaine de 1781, se trouvent ici ajoutés les traités d'amitié et de commerce signés par les États-Unis avec les Pays-Bas en 1782 et avec la Suède en avril 1783. Une édition partielle, initiée sans l'avis de Benjamin Franklin mais acceptée par lui, avait paru en 1778 (cf. ci-dessous le n° 53).
OEUVRE DE VERITE ET DE PROPAGANDE VOULUE PAR BENJAMIN FRANKLIN, ce recueil fut traduit à sa demande par son ami le duc Louis-Alexandre de La Rochefoucauld d'Enville, aristocrate acquis aux idées nouvelles et ardent partisan de la cause américaine. Benjamin Franklin souhaitait donner une image exacte de la réalité institutionnelle américaine, pour dissiper certaines idées fausses qui circulaient en Europe, et il décida de publier les Constitutions américaines, dans la lange véhiculaire qu'était alors le français, avec des commentaires en grande partie de sa plume. Les censeurs royaux se montrèrent réticents, car les négociations de paix avec l'Angleterre étaient entrées dans leur stade final - la paix de Paris serait signée en septembre 1783. Cependant Benjamin Franklin sollicita en mars 1783 l'appui du ministre des Affaires étrangères le comte de Vergennes qui, après accord du garde des Sceaux le marquis de Miromesnil (avril), permit d'en débuter l'impression. Celle-ci fut rapidement achevée, Vergennes donnant son approbation définitive en mai, et la diffusion débuta en juin 1783 : Benjamin Franklin en fit notamment adresser deux exemplaires à chaque Cour d'Europe, pour être remis au souverain et à son ministre des Affaires étrangères.
LA LECTURE DES CONSTITUTIONS AMERICAINES (et pas seulement de celle fédérale de 1787) JOUA UN GRAND ROLE DANS LA REFLEXION MENEE PAR LES REDACTEURS DE LA CONSTITUTION FRANÇAISE DE 1791.
PREMIERE FIGURATION DU SCEAU DES ÉTATS-UNIS DANS UN OUVRAGE IMPRIME : gravé sur bois, il est ici estampé au titre. Ce sceau avait été conçu à la suite des travaux de Benjamin Franklin, Thomas Jefferson, John Adams puis de trois comités, et adopté par le Congrès continental en juin 1782 sur présentation de Charles Thompson, secrétaire de ce Congrès. Benjamin Franklin, très conscient de l'efficacité visuelle d'un symbole pour représenter la réalité d'une nation, fut le premier à le faire représenter, dans la présente édition française des Constitutions américaines.
Broché tel que paru.
CET EXEMPLAIRE A FIGURE DANS L'EXPOSITION BENJAMIN FRANKLIN : UN AMERICAIN A PARIS, 1776-1785, TENUE AU MUSEE CARNAVALET à Paris du 5 décembre 2007 au 9 mars 2008.
Provenance : « F. Taupin » (ex-libris manuscrit sur une des premières gardes).
CONSTITUTIONS. - Recueil des loix constitutives des colonies angloises, confédérées sous la dénomination d'États-Unis de l'Amérique-septentrionale. 1778. Cf. ci-dessous le n° 53.
CONSTITUTION FEDERALE DES ÉTATS-UNIS DE 1787. Impression en annexe de l'ouvrage de John STEVENS, Examen du Gouvernement d'Angleterre, comparé aux Constitutions des États-Unis, 1789. Voir ci-dessous le n° 56.
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Estimé 2 000 € - 3 000 €
Par Maître Brice Pescheteau-Badin à Paris le 06/11/2024 : LA FAYETTE (Gilbert Du Motier de). Lettre autographe signée à Romain Joseph de Brigode. MONTGOMERY (ALABAMA), 4 mars 1825. Une p. 1/4 in-4, adresse au dos avec cachet de cire noire à ses initiales « L F. » conservé en deux parties ; déchirures au feuillet d'adresse dues à l'ouverture sans atteinte au texte.
RARE ET MAGNIFIQUE TEMOIGNAGE DE SA TRIOMPHALE TOURNEE AUX ÉTATS-UNIS. À la sollicitation du président James Monroe, le marquis de La Fayette vint aux États-Unis comme « invité de la nation ». D'août 1824 à septembre 1825, il visita les vingt-quatre États que comptait alors le pays. Considéré comme le héros français de l'Indépendance, alors que Rochambeau était mort en 1807, le marquis de La Fayette put faire l'expérience de l'immense popularité dont il jouissait : il reçut toutes sortes de présents, tandis que des villes, des rues ou des écoles étaient rebaptisées de son nom en son honneur. Le futur diplomate Auguste Levasseur, qui accompagna le marquis, publia en 1826 un récit de ce voyage.
« Je réponds à la fois à Célestine et à vous, mon cher ami, n'ayant qu'un moment au milieu de notre course rapide dont le but bien désiré de nous rapprocher avant la fin de l'été de tout ce qui pleurerait avec nos pertes communes si nous n'étions pas nécessairement séparés par un immense espace. Vous savés ce qu'était pour moi M[a]d[am]e d'Hénin , ce qu'était pour nos deux familles l'excellente M[a]d[am]e de Tracy. [Amie intime du marquis de La Fayette et ancienne dame du Palais de Marie-Antoinette, Adélaïde Félicité Étiennette de Guinot de Monconseil, princesse d'Hénin-Liétard, était morte en août 1824 ; fille du comte de Tracy dont les écrits philosophiques influencèrent Thomas Jefferson, Françoise Émilie Destutt de Tracy était la belle-mère de Georges Washington de La Fayette, fils du marquis, et venait de mourir en décembre 1823 ; en outre, le beau-père du marquis de La Fayette, Jean-Paul Louis François de Noailles était mort en octobre 1824.]
De bons amis et bons citoïens ont aussi péri depuis notre départ, et ici, depuis notre arrivée, il est mort plusieurs hommes dignes de nos regrets, parmi lesquels deux respectables compagnons d'armes. C'est ainsi que DANS LE TOURBILLON DE BONTES LES PLUS TOUCHANTES, DE JOUISSANCES TRES VIVES, mon bonheur a été troublé par de grandes calamités et d'autres sujets de regret.
Il y a près de huit mois, mes chers amis, que chaque jour d'une vie active, et chaque pas d'une grande étendue de païs ont été marqués par tout ce qui peut flatter et toucher le coeur ; LA PROSPERITE PUBLIQUE ET INDIVIDUELLE DES ÉTATS-UNIS, LA RAPIDITE ET L'IMPORTANCE DES AMELIORATIONS et des créations seraient un problème aussi insoluble qu'il paraît surprenant, si la solution ne se trouvait tout simplement DANS LA PRATIQUE REELLE DES INSTITUTIONS LIBRES CONSERVEES PAR LE PATRIOTISME ET GOUVERNEES PAR LE BON SENS. Tout cela se fait à bon marché, si vous exceptés le passage de l'hôte national, et ailleurs on paie bien cher, comme je disais l'autre jour, l'arbitraire, les privilèges et les tracasseries...
JE VIENS DE PASSER DE L'ÉTAT DE GEORGIE DANS LE NOUVEL ÉTAT D'ALABAMA [admis dans l'Union en 1819] EN TRAVERSANT PENDANT QUATRE JOURS UNE CONTREE ENCORE HABITEE PAR LES INDIENS, ET CEUX-CI ONT PRIS PART AUSSI AUX RECEPTIONS DONT J'AI LE BONHEUR D'ETRE L'OBJET : NOUS AVONS TROUVE ICI DEUX BEAUX BATEAUX A VAPEUR QU'ON A FAIT VENIR POUR NOUS CONDUIRE A MOBILE D'OU NOUS IRONS A [LA NOUVELLE-] ORLEANS POUR REMONTER LE MISSISSIPI ET L'OHIO, ET VISITER TOUS LES ÉTATS DE L'OUEST. Nous reviendrons ensuite à Boston où je suis attendu le 17 juin pour la première pierre du MONUMENT DE BUNKERS HILL [commémorant la bataille de Bunkers Hill, tenue le 17 juin 1775 entre les patriotes américains et les Anglais à Charleston, face à Boston].
Adieu, mes chers amis. Mille amitiés à votre frère [le comte Louis-Marie-Joseph de Brigode, pair de France]. J'embrasse Georgine et Gabrielle, dont je suis charmé de trouver les noms dans les gazettes américaines... »
MEMBRE DE LA FAMILLE DU MARQUIS DE LA FAYETTE, ROMAIN JOSEPH DE BRIGODE (1775-1854) était l'époux d'une petite fille de celui-ci, Célestine de Faÿ de La Tour-Maubourg. Il commença sa carrière comme auditeur au Conseil d'État et membre du Corps législatif sous l'Empire, puis fut député du Nord à maintes reprises de 1815 à 1837, siégeant avec la gauche constitutionnelle à laquelle appartenait également La Fayette.
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Estimé 1 500 € - 2 000 €
Par Maître Brice Pescheteau-Badin à Paris le 06/11/2024 : CHAMP-D'ASILE. — [L'HÉRITIER (Louis-François)]. Le Champ-d'asile, tableau topographique et historique du Texas, contenant des détails sur le sol, le climat et les productions de cette contrée ; des documens authentiques sur l'organisation de la colonie des réfugiés français ; des notices sur ses principaux fondateurs ; des extraits de leurs proclamations et autres actes publics : suivi de lettres écrites par des colons à quelques-uns de leurs compatriotes. Paris, Ladvocat, 1819. Petit in-8, viii-247-(une blanche) pp., demi-veau brun orné (Loutrel).
ÉDITION ORIGINALE, RARE, publiée « au profit des réfugiés » du Champ-d'asile.
UN INSTRUMENT DE PROPAGANDE DESTINE A RECUEILLIR DES FONDS ET A RECRUTER COLONS ET SOLDATS. Louis-François L'Héritier rappelle ici une histoire de ces « réfugiés » fixés au Texas, détaille la composition de leur groupe, avec notices biographiques sur le maréchal Grouchy, ainsi que les généraux Charles et Henri Lallemand et le général Antoine Rigau. Il explicite aussi l'organisation du camp en s'appuyant sur ce qui est présenté comme des témoignages d'officiers du Champ-d'asile.
OFFRANT UN TABLEAU IDYLLIQUE DU TEXAS. Affirmant tenir ses informations d'un missionnaire français ayant résidé à San Antonio, Louis-François L'Héritier décrit la région du Champ-d'asile sous ses différents aspects : géographie, histoire naturelle (botanique, zoologie, minéralogie), ethnologie (nombreux détails sur la population indienne), présence limitrophe des Espagnols et des Américains.
DETOURNEMENT MILITAIRE D'UNE ENTREPRISE COLONIALE CIVILE ACCREDITEE PAR LE CONGRES AMERICAIN. À La Nouvelle-Orléans, où se croisaient des français immigrés pour des raisons diverses, naquit l'idée d'établir collectivement une colonie agricole vouée à la culture de la vigne et de l'olivier. Après une campagne de promotion dans un journal francophone, L'Abeille de La Nouvelle-Orléans, une société coloniale fut fondée (The Vine and Olive Colony) dont les actionnaires comprirent en tout une centaine de bonapartistes et révolutionnaires ayant quitté la France après Waterloo, environ deux cents réfugiés de la révolution de Saint-Domingue, et une centaine de personnes modestes ayant émigré pour raisons économiques. Cette société fut d'abord présidée par le général Lefebvre-Desnouettes, ancien commandant de la cavalerie légère de la Garde impériale, appuyé par d'autres exilés de marque dont le maréchal Emmanuel de Grouchy, les généraux Henri et Charles Lallemand (autres officiers de la Garde) ou le conventionnel régicide Joseph Lakanal. Après quelques mois de prospection, des terres furent choisies en Alabama. Le vice-président de la société, le négociant William Lee, ancien consul des États-Unis à Bordeaux et favorable à l'Empire, activa ses relais à Washington et obtint des soutiens politiques auprès de Thomas Jefferson, James Madison, James Monroe et Henry Clay : en février 1817, un décret du Congrès céda les terres en question à la Société coloniale à des conditions très favorables, les acquéreurs avaient 14 ans pour les mettre en valeur avant de les payer, et à un prix extrêmement bas. C'est Charles Lallemand qui, ayant succédé au général Lefebvre-Desnouettes, fut chargé de la répartition des lots.
Dès l'automne 1817, cependant, ce général à l'esprit aventurier commença à organiser une expédition militaire contre le Texas espagnol, recrutant au sein de la société en prétendant avoir le soutien du Gouvernement américain : en décembre 1817, il se trouva à la tête d'un petit groupe d'une centaine d'hommes, vétérans français et européens des armées napoléoniennes, avec pour lieutenants à ses côtés son frère Henri Lallemand et le général Antoine Rigau. Il parvint à réunir des fonds de manière douteuse en obtenant de ses partisans qu'ils vendent leurs terres à un prix inférieur à celui qui avait cours aux plus gros actionnaires de la société coloniale, lesquels participèrent en échange au financement de l'entreprise. Charles Lallemand, dont les motivations étaient en fait peu claires, renversa ses buts militaires et affirma former une troupe d'appoint pour les Espagnols. L'expédition fut lancée par mer, parvint à l'île de Galveston au large des côtes du Texas, dont le corsaire et pirate français Jean Lafitte était le maître, puis, avec l'aide de celui-ci, se fixa à terre au Sud de la bande neutre de terre contestée entre la Louisiane et le Mexique, près de la Trinity River.
Pour attirer de nouveaux fonds et des hommes, il organisa une campagne d'opinion présentant con camp militaire comme un « champ d'asile » de réfugiés ayant fui l'Europe pour des raisons de persécution politique : la presse francophone et anglophone américaine fut sollicitée, de même que les journaux anglais, ou la presse française libérale dont La Minerve de Benjamin Constant - quelques fameux libelles dont celui-ci furent en outre publiés en France. Les principes affichés étaient collectivistes, égalitaires, libéraux, et les hommes du Champ-d'asile étaient présentés comme de vertueux soldats-laboureurs. Charles Lallemand, qui maintenait une discipline de fer et réprimait les tentatives de désertion de plus en plus nombreuses en raison de la détresse économique du camp, présentait au monde un tableau idyllique et idéologique inexact - mentait aussi à ses hommes en leur promettant l'arrivée de fonds et de renforts. En outre, l'esprit d'indépendance qui caractérisait ses déclarations à la presse faisant craindre une entreprise de sécession territoriale, de même que le bonapartisme de ces hommes armés associé aux rumeurs d'expédition de libération de Napoléon Bonaparte à Sainte-Hélène, inquiétèrent aussi bien les Espagnols que les Américains.
En août 1818, la troupe réduite à moins de 60 hommes quitta le Champ-d'asile à l'annonce de l'envoi d'une troupe espagnole, et se réfugia sur l'île de Galveston. Là, Antoine Rigau à qui Charles Lallemand avait abandonné le commandement, reçut un émissaire américain qui sembla entrer dans leurs vues mais qui fut désavoué par le président James Monroe. Sous pression politique et militaire, dans une situation économique dramatique, et minée par des dissensions internes, l'aventure du Champ-d'asile s'acheva définitivement à la fin de l'année 1818.
UNE AVENTURE PICARESQUE AUX CONSEQUENCES GEOPOLITIQUE BIEN REELLES : les États-Unis profitèrent de l'occasion pour chasser de Galveston les frères Laffite et leurs flibustiers, et se décidèrent à régler la question de la frontière entre le Texas espagnol et la Louisiane : le secrétaire d'État John Quincy Adams et l'ambassadeur d'Espagne aux États-Unis Luis de Onís conclurent en 1819 un traité qui en délimitait précisément le tracé.
UN MYTHE LIBERAL DURABLE : la bonne image du Champ-d'asile comme refuge de la liberté fut diffusée largement par La Minerve de Benjamin Constant, véhiculée aussi par des estampes gravées en 1818, sans parler d'une chanson du très populaire poète libéral Pierre-Jean de Béranger. Cette vision positive subsista longtemps, et la France de Louis-Philippe Ier (qui organisa le retour de la dépouille de Napoléon Ier en France) fut la première à reconnaître en 1839 l'indépendance de la République du Texas après sa sécession du Mexique. Cependant, au début des années 1840, Honoré de Balzac fit du personnage de Philippe Brideau dans La Rabouilleuse, un colonel d'Empire ruiné par le général Lallemand dans l'aventure du Champ-d'asile, « une des plus terribles mystifications connues ».
VETERAN DES GUERRES NAPOLEONIENNES, L'ECRIVAIN LOUIS-FRANÇOIS L'HERITIER (1789-1852) publia les Fastes de la gloire (1818-1822) sur l'épopée révolutionnaire et napoléonienne, et collabora au journal libéral de Benjamin Constant, La Minerve, un des soutiens du Champ-d'asile en France. Il donna aussi quelques ouvrages littéraires personnels, des traductions, et fut le « teinturier » des mémoires de Vidocq.
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Estimé 600 € - 800 €
Par Maître Brice Pescheteau-Badin à Paris le 06/11/2024 : [HILLIARD D'AUBERTEUIL (Michel-René)]. Histoire de l'administration de Lord North, ministre des Finances en Angleterre, depuis 1770 jusqu'en 1782, et de la guerre de l'Amérique septentrionale, jusqu'à la paix : suivie du Tableau historique des finances d'Angleterre, depuis Guillaume III [roi de 1689 à 1702] jusqu'en 1784. À Londres, et se trouve à Paris, chez l'auteur, Couturier, 1784. 3 tomes en un volume in-8, 18 [erronément chiffrées xx sans manque]-276-(4 dont celles aux versos blanches)-180-80 pp., basane brune marbrée, dos à nerfs orné de filets et motifs bruns, tranches rouges (reliure moderne dans le goût de l'époque).
ÉDITION ORIGINALE de cette histoire qui s'inspire librement d'un ouvrage anonyme anglais qui connut deux éditions à Londres sous deux titres différents, The History of Lord North's administration (1781) puis A View of the history of Great-Britain, during the administration of Lord North (1782). Michel-René Hilliard d'Auberteuil en a produit ici une traduction très remaniée, à laquelle il a personnellement ajouté un historique de la guerre d'Indépendance des États-Unis et un tableau historique des finances de l'Angleterre. Le contrôleur général des Finances Charles-Alexandre de Calonne faisant alors interdire presque toutes les publications abordant les questions financières, l'ouvrage faillit être censuré : le Tableau, soumis aux autorités en août 1783, obtint difficilement une autorisation tacite, et l'Histoire proprement dite, soumise en décembre 1783, se vit d'abord refusée en janvier 1784 avant d'obtenir finalement aussi une autorisation tacite en mars 1784. Benjamin Franklin, qui lut et corrigea certaines épreuves de l'ouvrage, contribua à sa diffusion en envoyant, à la demande de l'auteur, plusieurs exemplaires à Robert Livingston aux États-Unis.
Carte dépliante gravée sur cuivre hors texte.
Michel-René Hilliard d'Auberteuil, né probablement en 1740 à Rennes, et mort aux Antilles en 1785 ou 1789, mena une vie agitée sur laquelle il existe peu de renseignements. Il séjourna à Saint-Domingue durant dix ans (d'environ 1765 à la fin de 1775) et rentra en France où la publication de son premier ouvrage, consacré à Saint-Domingue et critique envers l'administration coloniale, lui valut d'être poursuivi. Esprit voltairien, anticlérical, membre de la Loge les Neuf Soeurs, il exprima des idées audacieuses qui lui valurent l'hostilité des autorités. Il s'expatria alors un temps dans les colonies anglaises d'Amérique du Nord, puis revint en Europe. En 1784, il était en prison, sans doute sur ordre du duc de Castries, ministre de la Marine et des Colonies, toujours en raison de son premier ouvrage. De nouvelles poursuites furent engagées contre lui en 1786 par Calonne, sans succès, et il repartit pour les Antilles où il serait mort assassiné. Il laissa entre autres plusieurs ouvrages importants sur l'Amérique du Nord.
RARE.
PROVENANCE : LE GENERAL HENRI CRUBLIER DIT D'OPTERRE (signatures ex-libris sur les faux-titres des 2 premiers tomes). Général de la Révolution française, député à la Législative dont il fut un des secrétaires, Henri Crublier dit d'Opterre (1739-1799) avait participé comme officier du Génie à la guerre d'Indépendance des États-Unis : ARRIVE EN AMERIQUE EN 1780, IL SERVIT SOUS LES ORDRES DE ROCHAMBEAU : stationné à Newport, il prit part à la reconnaissance sur New York et West Point, et participa au siège d'Yorktown.
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