Des routes de la soie aux enchères : une collection exceptionnelle de textiles d’Orient
par Magazine des enchères
Durant cinquante ans, Sylviane et Daniel Guinaudeau ont cultivé avec ferveur leur amour pour les textiles provenant des routes de la soie en collectionnant des pièces d’exception. Leur collection de plus de 200 pièces sera dispersée aux enchères par Adjug’art le 19 mars à Brest. A noter que le lendemain, une vente d’Arts d’Asie se tiendra, avec pour pièces maîtresses des porcelaines de la Compagnie des Indes ou bleu de Hué, ainsi qu’un tableau de Lin Fengmian. Tour d’horizon…
[Mise à jour, 12 juin] Une robe de mandarin (lot 1), estimée entre 800 et 1 200 euros, a trouvé preneur à 6 250 euros (frais inclus) tandis qu’une robe « dragon d’été » changeait de main pour 2 250 euros.
À l’origine de cette vente, un échange, qui dure depuis plus de vingt ans, entre des passionnés devenus amis. Le commissaire-priseur Yves Cosqueric raconte : « J’ai rencontré Monsieur et Madame Guinaudeau alors qu’ils venaient régulièrement acheter dans nos ventes de textiles bretons des bonnets pour enfants, afin de compléter leur collection sur le thème de l’enfance. Il y a deux ans, ils m’ont parlé d’une autre de leur collection autour des routes de la soie, dont j’ignorais complètement l’existence. Ils ont alors décidé de nous faire confiance, rassurés par ma spécialité universitaire sur l’art chinois et indien, ainsi que par notre connaissance autour des ventes de textiles. » Et quel meilleur endroit que Brest, et la région bretonne, pour accueillir une vente dédiée aux commerces initiés par la Compagnie des Indes, dont le port français était Lorient…
Une collection unique affectionnée durant 50 ans
Ce penchant pour les routes de la soie trouve son origine dans la sphère familiale de Sylviane Guinaudeau qui a grandi auprès d’une mère couturière. Elle a ensuite transmis cette passion à son mari. Les quadragénaires ont associé cette ardeur à leur amour du voyage et rassemblé des pièces témoignant de l’histoire de ces célèbres itinéraires commerciaux qu’ils soient maritimes ou terrestres. Aujourd’hui, ils ont pris la décision de se séparer de leur collection de leur vivant, car leurs deux filles ne partagent pas le même engouement. C’est un moyen pour eux de s’assurer que chacun des objets qu’ils ont chéri durant des décennies seront transmis à de nouveaux passionnés.
« Le couple eut à cœur durant cinquante ans de privilégier la qualité afin de pouvoir prêter facilement leurs trouvailles à des musées ou de les exposer dans des salons de collectionneur pour échanger et partager avec des passionnés et des curieux », précise Yves Cosqueric. Aussi, le catalogue regorge de préciosités tels que des manteaux, robes, chaussons, bonnets, kimonos, calottes, porte-bébés et des bijoux venant de Chine, d’Inde, du Moyen-Orient, du Japon, d’Europe Centrale et du Pakistan. La vente dévoilera par exemple des chaussons « papillon » en soie (80 à 120 euros), traditionnellement offerts en Chine pour le premier anniversaire d’un enfant, et deux étonnants porte-bébés indonésiens (250 à 400 euros) entièrement brodés de perles.
Le dernier élément qui confère à cette collection un caractère exceptionnel réside dans le fait que dès qu’ils en avaient l’opportunité, toutes les informations de provenance des pièces acquises lors de ventes aux enchères ou auprès de marchands et de particuliers étaient consciencieusement consignées. Un détail significatif pour les collectionneurs qui pourront ainsi retracer plus précisément l’histoire de ces lots, en fonction de la date de leur arrivée en France. C’est le cas d’une robe dragon d’été à décor de paons et dragons (600 à 800 euros) rapportée en 1896 à Marseille par un commandant en service sur le « Charles Roux », un paquebot de la Compagnie Générale Transatlantique.
Des porcelaines bleu de Hué et un tableau de Lin Fengmian
Le périple se poursuivra le 20 mars avec la dispersion d’objets, comme des estampes, des sculptures, des peintures ou des armes, provenant de Thaïlande, du Cambodge, du Népal, de Chine, du Japon et d’Inde. Quelques-uns sont issus de la collection de Sylviane et Daniel Guinaudeau mais la plupart ont été rassemblés par Yves Cosqueric au fil de ses rencontres et de ses inventaires.
Des instruments de navigation, comme un rare cadran solaire universel (1 200 à 1 500 euros), ouvriront la vente qui mettra en lumière la thématique du voyage. Les échanges entre l’Orient et l’Occident seront évoqués avec la dispersion d’une importante collection de porcelaines de la Compagnie des Indes, très attendue des collectionneurs. En effet, une majorité des pièces présentent des armoiries, toutes identifiées. Il faudra compter entre 50 et 60 euros pour une jatte, et entre 800 et 1 200 euros, pour une suite de quatre assiettes. Également dispersée, une sélection de pièces en porcelaine dite « bleu de Hué« , aujourd’hui très recherchées par les amateurs. Produites en Chine pour le Vietnam, elles seront proposées entre 60 et 800 euros.
Enfin, un tableau de Lin Fengmian (1900-1991), estimé 40 000 à 60 000 euros, devrait susciter l’intérêt des amateurs de peinture chinoise du XXe siècle. Cette aquarelle et encre, acquise directement auprès de l’artiste en Chine, présente un paysage entre mer et montagne, dans un format carré, chose rare dans la peinture chinoise. Lin Fengmian compte parmi les artistes emblématiques de la seconde moitié du XXe siècle qui participèrent au renouveau de l’art chinois, en imposant un art contemporain entre abstraction et figuration.
Yves Cosqueric conclut en expliquant que « les demandes de renseignements et de photographies supplémentaires affluent de France, mais aussi de Chine, d’Angleterre, d’Allemagne et des Etats-Unis. Les 600 lots dispersés durant deux jours feront traverser le monde entier, il est donc normal que l’intérêt soit vif ! »
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