Le 15 décembre 2014 | Mis à jour le 15 décembre 2014

Tirésias lève le rideau sur son décor

par Magazine des enchères

[Lot du jour] Le 24 juin 1917 avait lieu l’unique représentation des Mamelles de Tirésias, pièce de Guillaume Apollinaire créée à Paris au théâtre René Maubel. Fantasque et irrationnel, ce « drame sur-réaliste » fit scandale dans la France de l’après-guerre, et ne fut réinterprétée pour la seconde fois qu’en 1949. C’est le décor de cette seconde représentation, une grande huile sur toile réalisée par Serge Férat (3,45 par 5,20 m), qui est aujourd’hui mis en vente par Maître Vincent Wapler le vendredi 19 décembre 2014 à Paris

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« Délirant, grotesque et loufoque ». Tels sont les mots de l’expert Frédéric Chanoit pour décrire le texte des Mamelles de Tirésias. Cette pièce est en effet un des textes précurseurs du surréalisme, appellation tirée de l’adjectif « sur-réaliste », inventé par Apollinaire et repris ensuite par André Breton. L’intrigue se déroule à Zanzibar et développe des thématiques, houleuses pour l’époque, telles que le féminisme et l’antimilitarisme. Le personnage de Thérèse déclare ainsi à son mari qu’elle veut se transformer en homme et se faire dorénavant appeler Tirésias, afin de faire carrière dans des professions jusque là réservées aux hommes. Thérèse fait ainsi exploser ses fausses mamelles sur scène avant de clamer qu’elle a « envie d’être soldat […] et non pas faire des enfants ». Outre cet aspect féministe, la pièce aborde donc la thématique plus large de la procréation obligée au lendemain de la Première Guerre mondiale.

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Evénement politique et historique, cette pièce, emprunte d’un « esprit nouveau » selon la critique littéraire, fit également scandale auprès des peintres cubistes. Férat étant lui-même cubiste, les peintres refusaient que leur mouvement soit assimilé aux valeurs que la pièce prônait. Ils redoutaient en effet la confusion qu’elle pourrait induire dans l’esprit des spectateurs, bien qu’Apollinaire n’ait jamais revendiqué avoir fait du théâtre cubiste.

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Le décor présenté ici est inspiré des esquisses qui restaient du décor de 1917 réalisé grâce à des bouts de papiers colorés collés le jour même de la représentation sur le mur du théâtre. Exécuté pour la Compagnie du Théâtre indépendant qui jouait la pièce au Théâtre des Noctambules, il représente la ville de Zanzibar avec son kiosque à journaux et des immeubles inclinés. Ces éléments urbains sont encadrés par un grand rideau sur la gauche, avec sa cantonnière et un navire mâté sur la droite qui figure le port de la ville. Proposée entre 12 000 et 15 000 euros, cette huile sur toile attirera l’attention des amateurs du cubisme, du théâtre et de l’avant-garde du début du XXe siècle.

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A noter que le même jour, vendredi 19 décembre, également à Paris, sera vendu  par la maison Galateau & Pastaud un exemplaire du texte de cette pièce de Guillaume Apollinaire dans son édition de 1918 (estimation entre 200 € et 250 euros).

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Lien vers l’annonce de vente aux enchères du tableau

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