Un tableau de Sarah Bernhardt aux enchères près de Lyon
Alors qu’au Petit Palais à Paris, une exposition rendait cet été hommage aux multiples talents de Sarah Bernhardt, actrice autant qu’artiste, une vente aux enchères dévoile une nature morte de sa main…
Les peintures de la main de Sarah Bernhardt sont suffisamment rares sur le marché pour que la venue de l’une d’elles attise notre curiosité : un Vase de fleurs peint sur carton animera les enchères demain à Corbas, près de Lyon. Ce petit tableau arrive à point nommé alors qu’au Petit Palais, à Paris, s’achevait le 27 août dernier une exposition d’envergure retraçant, en quelques quatre cents œuvres, la carrière de « La Divine ». L’événement avait le mérite de révéler au public un pan méconnu de la vie de Sarah Bernhardt qui, si elle fut l’interprète mythique des plus grands dramaturges, s’illustra également par ses talents de sculptrice et peintre, n’en déplaise à certains critiques – « Qu’une loi soit votée immédiatement pour empêcher l’accumulation de talents » leur répondait Emile Zola.
Sarah Bernhardt, une artiste parmi les artistes
Dans les années 1870, Sarah Bernhardt vit entourée d’artistes. L’hôtel particulier qu’elle s’est fait construire rue Fortuny, dans le quartier prisé de la plaine Monceau, voit défiler les peintres Alfred Stevens, Gustave Doré, Jules Bastien-Lepage, ainsi que Georges Clarin et Louise Abbéma avec lesquels elle noue une relation privilégiée. Ces derniers la représentent sur scène, autant que dans son intimité, et stimulent sa créativité. L’actrice apprend le modelage, puis la peinture, fréquente l’Académie Julian à Paris et expose au Salon. Elle fait preuve d’une telle virtuosité qu’une mention honorable lui est décernée par le jury du Salon pour sa sculpture inspirée de La Pietà de Michel-Ange, Après la tempête. Le Tout-Paris mondain et artistique défile dans son atelier-salon, où elle se plaît à mettre en scène ses œuvres.
« La couleur, elle la devine, elle la sait »
Si la sculpture a sa préférence, Sarah Bernhardt manie avec habileté le pinceau au sein de natures mortes et portraits. Au Salon de 1880, l’historien d’art et critique Paul Mantz souligne d’ailleurs ses talents de coloristes, tout en émettant des réserves à l’égard de son dessin : « Pour dessiner une figure et surtout pour la faire parler, Mlle Sarah Bernhardt a encore beaucoup à apprendre ; mais, quant à la couleur, elle la devine, elle la sait », écrit-il au sujet La Jeune Fille et la Mort dans son compte-rendu du Salon. Un commentaire qu’il aurait sans doute répété devant notre Vase de fleurs traité en un élégant camaïeu de roses, rythmé de touches vertes et jaunes posées à la manière impressionniste. Si au théâtre la comédienne excelle dans le répertoire classique, elle livre, en peinture comme en sculpture, une œuvre ancrée dans la modernité.
Des peintures très rares sur le marché
Nous l’annoncions en préambule, les peintures de Sarah Bernhardt sont particulièrement rares sur le marché. La dernière vente remonte à 2019, avec un autoportrait de 1879 adjugé 3 792 euros à l’Hôtel des ventes d’Enghien-les-Bains, et l’on comptabilise moins de dix vacations depuis le record établit en 1995 avec un Autoportrait en Pierrot adjugé 11 235 euros à New York. Gageons que notre Vase dépassera son estimation de 1 000-1 500 euros du fait de la mise en lumière récente de celle que Jean Cocteau surnommait le « monstre sacré ».
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Photo en Une : Jules Bastien-Lepage, Portrait de Sarah Bernhardt, 1879, huile sur toile, collection particulière.
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