Le 24 juin 2024 | Mis à jour le 24 juin 2024

Tout savoir sur l’émeraude, l’une des pierres les plus prisées sur le marché

par Diane Zorzi

L’émeraude, dont l’origine remonte à l’époque des pharaons, est l’une des pierres les plus prisées sur le marché, après le diamant et le rubis. L’expert en bijoux et gemmologue Hector Yaiche revient sur l’histoire de cette pierre verte brillante et livre aux lecteurs du magazine ses conseils pour acquérir une émeraude aux enchères…

 

Quelle est l’origine du terme ?

Hector Yaiche : Le terme « émeraude » vient du grec « smaragdos » qui signifie « pierre verte brillante ».

 

Comment reconnaît-on une émeraude ?

H.Y. : L’émeraude est un béryl qui se distingue par sa couleur verte, au même titre que l’aigue-marine (bleu), la morganite (rose), ou l’héliodore (jaune). Pour un gemmologue, c’est une gemme facilement reconnaissable tant par son indice de réfraction qui se situe entre 1570 et 1600 que par ses multiples inclusions caractéristiques dites « jardins ».

 

Pourquoi l’émeraude est-elle verte ?

H.Y. : L’émeraude doit sa couleur à la présence de chrome et/ou de vanadium en impureté. Ce qui est passionnant, c’est que normalement le béryllium, qui est un des constituants chimiques de l’émeraude, possède une probabilité quasi nulle de rencontrer ces deux éléments chromogènes (Cr et V). On parle pour l’émeraude de paradoxe géochimique.

 

Quand l’émeraude a-t-elle été découverte ?

H.Y. : Ce sont les Égyptiens qui, à l’époque des pharaons, ont été les premiers producteurs et utilisateurs d’émeraudes. On trouve des indices d’une probable exploitation autour du IIIᵉ siècle avant notre ère avec les mines du « mont Smaragdus », surnommées aussi les mines de Cléopâtre. Il faut comprendre que dans les temps anciens, la minéralogie n’existait pas et que le critère principal de sélection était la couleur. Il est compliqué de savoir si ce terme désignait la gemme que l’on connaît aujourd’hui, c’est-à-dire la variété verte du béryl, ou alors s’il englobait aussi les différentes pierres vertes que l’on trouvait dans l’Antiquité comme le péridot ou la malachite, dont les gisements étaient connus.

C’est lors de la période romaine que l’émeraude jouit véritablement d’une grande notoriété, notamment grâce à l’empereur Néron dont le vert était la couleur préférée. Pline l’Ancien (Ier siècle) dans Histoire naturelle nous renseigne sur l’utilisation de l’émeraude à cette époque. Les historiens débattent encore pour savoir si l’empereur Néron regardait les combats de gladiateurs à travers son émeraude ou s’il regardait sa pierre pour reposer ses yeux après une longue journée de combats dans le Colisée.

Les Celtes ont aussi découvert le gisement d’Habachtal, en Autriche, cette vallée montagneuse surnommée la « Montagne des Verts Joyaux ». Elle a fourni entre autres « l’émeraude de Saint Louis », une émeraude de 51.6 ct, qui a orné la couronne de France et qui est actuellement conservée au Muséum national d’Histoire naturelle à Paris.

Au Moyen Âge, l’émeraude suscite une certaine méfiance, du fait de sa couleur verte qui est associée aux monstres, aux dragons ou aux serpents. Elle est toutefois fréquemment utilisée dans la bijouterie de l’Empire byzantin, ainsi qu’à l’époque carolingienne. Les émeraudes étaient alors brutes et percées de part en part pour orner les bijoux de cette période. Il faut attendre la Renaissance, avec la découverte des gisements colombiens par les conquistadors, pour que l’émeraude retrouve sa gloire d’antan.

 

Où sont situés les principaux gisements d’émeraude ?

H.Y. : Pendant des siècles, c’est la Colombie qui approvisionnait le marché mondial des émeraudes. Depuis, d’autres gisements ont été découverts, notamment au Brésil, en Afghanistan, au Pakistan et surtout en Zambie. C’est d’ailleurs ce qui a motivé mon expédition en Zambie l’été dernier, pour partir à la recherche de ce nouvel eldorado qui a la réputation de rivaliser en termes de qualité avec les émeraudes colombiennes.

 

Comment s’assurer de l’authenticité d’une émeraude ?

H.Y. : Pour cela, il faut faire appel à un expert en bijoux. La gemmologie est une science, celle d’identifier les gemmes, car de nombreuses gemmes vertes sont présentes sur le marché et l’erreur est souvent possible, sans parler des imitations. Il faut savoir que l’émeraude est la gemme de couleur verte la plus recherchée et prisée sur le marché, hormis bien sûr les diamants verts naturels.

 

Quelle est la valeur de l’émeraude sur le marché ?

H.Y. : Les émeraudes sont les pierres les plus prisées sur le marché après le diamant et le rubis. Les plus recherchées sont celles provenant de Colombie, car elles sont de plus en plus rares à mesure que les gisements s’essoufflent. Le critère le plus important pour fixer la valeur d’une émeraude est sa couleur, que l’on recherche claire et saturée, dénuée de traitement chimique. La loi oblige d’ailleurs les experts à préciser si la couleur a été améliorée, et à indiquer la proportion d’huile ou de résine.

Plusieurs facteurs sont déterminants pour évaluer la valeur d’une émeraude. Le critère le plus important est sa couleur, que l’on recherche claire et saturée. Du fait de sa fragilité, nous sommes moins stricts sur la présence d’inclusions par rapport à d’autres gemmes. C’est d’ailleurs pour améliorer sa pureté interne que des traitements sont utilisés pour l’émeraude. Il faut savoir que l’émeraude possède une faible résistance à la température (elle fond vers 600°C), ce qui rend les traitements thermiques impossibles. L’objectif du traitement est de faire un joint optique dans la pierre pour atténuer les jardins présents. On utilise soit de l’huile, soit de la résine pour remplir ses fractures. Ce sont des traitements historiques, Pline l’Ancien dans l’Antiquité décrivait déjà des méthodes qui mélangeaient de l’huile et du jus de poireaux. Il faut aussi faire la distinction entre deux types de traitement par remplissage : celui qui va améliorer la couleur, par l’utilisation d’un produit coloré, et celui qui ne va pas intervenir dans la couleur, par l’utilisation d’un produit incolore. Pour connaître la proportion d’huile et de résine, il faut avoir un certificat de laboratoire. La loi oblige d’ailleurs les experts à préciser si la couleur a été améliorée. Peu de gens le savent, mais plus de 90% des émeraudes sur le marché sont traitées.

L’origine géographique est une donnée non négligeable. Les émeraudes les plus recherchées sont celles provenant de Colombie, car elles sont de plus en plus rares à mesure que les gisements s’essoufflent. Le seul moyen de connaître l’origine est d’obtenir un certificat de laboratoire reconnu qui l’atteste.

En définitive, il est complexe de définir la valeur moyenne d’une émeraude car chaque paramètre est à prendre en compte et chaque pierre est unique.

 

Comment choisir son émeraude ?

H.Y. : Avant de choisir, il convient en premier lieu de déterminer la matière à laquelle nous sommes confrontés. Pour répondre à cette question, il faut avoir un certificat de laboratoire, ou obtenir l’avis d’un gemmologue équipé. Il y a un marché du très haut de gamme avec des émeraudes qui n’ont aucun traitement et ne possèdent aucune inclusion visible à la loupe, mais ce n’est pas la majorité des cas. Aux enchères, l’on trouve des émeraudes très abordables. Je préconiserais de la faire monter en pendentif ou boucles d’oreilles du fait de sa fragilité. Lorsque des clients me sollicitent lors des expositions qui précèdent les ventes, je leur conseille d’être particulièrement attentifs à la teinte qui est sans doute le critère le plus important s’agissant des pierres de couleur.

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Image en Une : Bague retenant une émeraude rectangulaire à pans coupés de 13 carats environ épaulée de deux diamants taille baguette. Adjugée 262 000 euros par Osenat le 22 février 2024 à Paris.

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