
Le nabab et le collectionneur suisse
Âgé de 15 ans à peine, le jeune Antoine-Louis Polier (1741-1795), Suisse de naissance et aventureux de caractère, s’embarque sur un paquebot en direction de l’Inde. Sur place, il travaille pour la Compagnies des Indes puis au service de l’empereur moghol Shah Alam II, qui le nomme ingénieur militaire et architecte de la cour. Passionné par la peinture de son pays d’adoption, Polier commandera de nombreuses œuvres à des artistes indiens.
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Samedi 26 avril 2014, la maison de ventes de Maîtres Gestas et Carrère à Pau mettra aux enchères l’une des miniatures commandées par Antoine-Louis Polier. Cette peinture de 29 par 41 centimètres est certainement l’œuvre du peintre indien Mihr Chand (1759-1786), reconnu comme l’un des plus grands artistes peintres de sa génération. A la fin du XVIIIe siècle, l’artiste s’établit à Lucknow, grand centre culturel sous l’impulsion du nabab Shôja al-Dawla. Mihr Chand rencontre alors Polier, qui lui commande cette œuvre. « Portrait du nabab Imad ul-Mulk au banquet dans la cour du palais du défunt Samsam ud-Doula» fait partie des peintures que Polier réunira soigneusement dans des albums, puis rapportera avec lui à son retour en Europe en 1788.
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La gouache représente le dignitaire Imad ul-Mulk entouré de ses invités, assis sur un large divan devant la cour d’un palais. Autour d’eux, de nombreux serviteurs leur apportent divers plats, serviettes, bouteilles, cauri… Derrière eux, deux parterres de fleurs encadrent un bassin où se reflète le palais, qui pourrait être celui d’un ministre de la cour. Plus loin encore, la profonde perspective de cette vue laisse apercevoir un autre jardin, aux travers des portes du palais. Au revers de cette page, quatre calligraphies disposées en compartiments encadrés d’arabesques végétales proposent des poèmes d’amour perses.
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Les albums d’Antoine-Louis Polier sont aujourd’hui très rares sur le marché car beaucoup ont été acquis par des musées. Issue d’une collection française, cette gouache proviendrait du même album dont des extraits ont déjà été vendus en 2011 à Paris. Deux pages avaient d’ailleurs été adjugée 105 000 et 120 000 euros chacune. Samedi 26 avril 2014, les commissaires-priseurs la mettront aux enchères depuis Pau et en direct sur le Live d’Interencheres avec une estimation de 30 000 à 40 000 euros.