Rodin et Barday, les amants de terre cuite
Lundi 18 mars à Lyon, la maison de ventes Chenu – Bérard – Péron dispersera 11 sculptures de Jeanne Bardey dernière élève et maîtresse d’Auguste Rodin. Parmi les lots figure un buste en terre cuite inédit du grand maître.
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Camille Claudel n’est pas la seule sculptrice avec laquelle Rodin entretint une inspirante relation… Lundi 18 mars 2013, la maison de ventes Chenu – Bérard – Péron vous racontera l’histoire de Jeanne Bardey, la dernière élève et maîtresse de l’artiste, avant de disperser une dizaine de ses sculptures dont les estimations oscillent de 200 à 2 000 euros. « Les œuvres de Bardey étant très rarement passées en vente publique, nous leur avons attribué de petites estimations, explique Maître Clément Schintgen, commissaire-priseur de l’étude. Pourtant, son travail, mais aussi sa vie, s’avèrent totalement fascinants. »
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Jeanne Bardey s’initie à la pratique artistique très tôt, comme la grande majorité des jeunes filles de bonne famille lyonnaises de la fin du XIXe siècle. Elle s’établit ensuite à Paris pour apprendre le dessin et la peinture, et elle se rend fréquemment au musée du Louvre pour copier les tableaux des grands maîtres. Un jour, dans un café près du jardin du Luxembourg, elle rencontre Auguste Rodin (1840-1917). Le sculpteur prend alors la jeune femme sous son aile et lui enseigne toutes les techniques de son art. Jeanne apprend vite et suit attentivement les conseils de son maître : appuyer les traits du visage, jouer sur la profondeur et le caractère des expressions. Une technique parfaitement maîtrisée dans le buste de Rodin qu’elle réalise en terre cuite (estimation 2 000 à 3 000 euros), alors que le sculpteur est venu s’installer quelques temps dans sa propriété de Lyon.
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Devenus amants, malgré les trente ans qui les séparent, la sculptrice a sommé son compagnon de consulter son médecin lyonnais car sa santé s’est mise à fortement décliner. Le couple réside alors dans la ville des lumières avec Henriette, la fille de Jeanne Bardey. Henriette devient le modèle de Rodin, qui est lui-même le modèle de sa maîtresse.
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Voyant sa fin approcher, Rodin décide de léguer ses sculptures à Jeanne Bardey. Mais l’Etat français ne l’entend pas de cette oreille. Rodin accepte finalement un compromis : il donne l’intégralité de son travail au musée qui portera son nom, à condition que sa compagne en soit la directrice. Mais la vie, ou plutôt les embuches tendues par certain(e)s empêcheront Jeanne d’accéder à ce poste ni même à aucune fonction dans cette institution… Rodin décède et la sculptrice se réfugie alors dans le travail.
Après sa mort, sa fille Henriette lègue ses œuvres à la Chambre de commerce et d’industrie de Lyon, qui les transfèrent alors dans les réserves du musée des Arts décoratifs de Lyon sans vocation de les exposer. Absente des collections, ainsi que des ventes publiques, les sculptures et les dessins de Jeanne Bardey restent invisibles. Ce n’est qu’en 1991, soit 37 ans après sa mort, que le grand public découvrira son travail à l’occasion de sa toute première exposition dans la région lyonnaise.
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Lien vers les sculptures de Bardey de cette vente aux enchères