Un Rodin classé Trésor National
Un plâtre de Rodin vient d’être classé Trésor National par le ministère de la Culture. Cette œuvre exceptionnelle, retrouvée dans un carton au fond d’un garde-meuble, n’aurait jamais pu être identifiée sans l’intervention des commissaires-priseurs de Pau.
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Une découverte fortuite
« Pour un inventaire mené en 2013 dans un appartement de Pau, je me suis rendu dans une maison de retraite où d’autres objets devaient être expertisés. Nous pensions alors qu’il s’agissait de bricoles. Mais une fois arrivé là-bas, j’ai découvert ce plâtre de 72 centimètres de haut, absolument incroyable », explique Maître Patrice Carrère. Le commissaire-priseur reconnaît l’œuvre signée de Rodin, qui sera alors placée dans un coffre.
C’est finalement en avril 2016, au cours d’un second inventaire réalisé à la requête d’un cabinet de généalogie, qu’une expertise est menée. Les commissaires-priseurs retrouvent le plâtre au fond d’un carton conservé dans un garde-meuble de Biarritz. Ils décident d’engager des analyses. Ils sollicitent pour cela le cabinet d’expertise Elisabeth et Philippine Maréchaux et font appel au comité Rodin avec lequel ils mènent de longues recherches, confrontant le plâtre à des moules conservés dans l’atelier du sculpteur à Meudon.
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Un tournant dans l’œuvre du maître
« Si les bronzes sont plus somptueux, nous nous sommes rendus compte que nous étions face à une pièce exceptionnelle. » Le plâtre réalisé en 1885 est la toute première version connue de la célèbre sculpture « Je suis Belle » que Rodin titra d’après le poème de Charles Baudelaire « la Beauté ». « Le plâtre est l’œuvre de préparation de « Je suis belle » la plus ancienne portée à notre connaissance. C’est donc le modelage d’origine effectué par Rodin, l’acte créateur ! » s’enthousiasme le commissaire-priseur. Et la surprise ne s’arrête pas là. L’œuvre pourrait être l’un des premiers exemples de la technique d’assemblage à laquelle s’emploiera l’artiste des années plus tard. « Ce serait en effet la première fois qu’il assemble deux personnages construits séparément. Je suis belle a été réalisée à partir de deux autres plâtres, L’Homme qui tombe et La femme accroupie. Le plâtre marque donc un tournant dans sa production.» La sculpture dans sa version en haut relief est intégrée à la célèbre « Porte de l’enfer ».
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Un trésor du patrimoine national
A œuvre exceptionnelle, traitement exceptionnel : le ministère de la Culture a classé le plâtre Trésor National. « L’œuvre ne peut donc plus être exportée pendant 30 mois. » Ce délai a pour but d’offrir aux musées nationaux le temps nécessaire pour rassembler suffisamment de fonds pour que l’œuvre puisse rejoindre leurs collections. Dans la perspective d’une vente future, l’estimation devient ainsi particulièrement complexe. « Nous avons pour le moment assuré l’œuvre à 700 000 euros. Mais dans le cadre d’une vente, l’estimation ne sera pas la même selon les marchés, uniquement français si l’on s’en tient aux 30 mois, ou international, à l’issue du délai. » A l’horizon, c’est en tout cas une belle bataille qui se profile dans laquelle le Musée Rodin devrait prendre place.
C’est grâce à l’appréciation de Maître Martine Gestas et des Maîtres Nathalie et Patrice Carrère, lors d’un simple inventaire, que ce plâtre majeur de Rodin a ainsi pu être révélé. Cette incroyable découverte témoigne de l’importance de recourir aux services des commissaires-priseurs en matière de succession. Habilités à mener les inventaires, les commissaires-priseurs disposent de toutes les compétences nécessaires pour déceler les biens de valeur et en révéler l’attribution. Sans eux, l’œuvre serait certainement restée dans un carton, à attendre qu’on en révèle toute la splendeur.
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